La crise actuelle dans le monde agricole révèle l’impasse du mode de production capitaliste qui broie les humains et détruit notre environnement. Le modèle de développement ultra-libéral centré sur l’industrie agro-alimentaire et la grande distribution dégagent de grosses marges, accentuent l’inflation et écrasent les agricultrices et agriculteurs, captifs et captives de ce système concurrentiel, qui doivent produire toujours plus pour survivre.
Ces questions nous concernent toutes et tous : la production de nourriture et de produits alimentaires est essentielle à nos vies !
Dans cette mobilisation, Solidaires est aux côtés de la Confédération paysanne. Ne nous trompons pas de cibles : ce ne sont pas les salarié·es des banques, de la sécurité sociale agricole, des préfectures ou des finances publiques qui sont responsables de la situation des paysan·nes. Ce ne sont pas les “normes” nécessaires – et encore insuffisantes – pour les droits des salarié·es, la santé, les conditions de travail ou l’environnement qui doivent diminuer.
Les réponses prévues du gouvernement, main dans la main avec la FNSEA, ne font globalement que renforcer la fuite en avant productiviste comme extractiviste avec les mégabassines, loin des préoccupations sociales et écologistes.
L’urgence, c’est le partage des richesses produites et de pouvoir vivre dignement de son travail. Pendant que les actionnaires du CAC 40 se partagent presque 100 milliards d’euros de dividendes, que le nombre de millionnaires croît et que la richesse des milliardaires explose, de plus en plus de travailleuses et travailleurs se retrouvent dans une situation précaire, face à l’inflation. Nous rappelons également que les femmes ont toujours, en moyenne, des salaires inférieurs de 20% à ceux des hommes.
Les paysan·nes ne sont pas les seul·es à se mobiliser sur la question des rémunérations : lundi 29 janvier les agent·es des finances publiques sont appelé·es à la grève, tout comme dans l’énergie le mardi 30. La grève dans l’éducation nationale le 1er février est axée notamment sur la question des salaires. Dans le rail, le 6 février marque le début d’une grève reconductible dans les technicentres sur ce sujet.La crise sociale est réelle et profonde.
L’Union syndicale Solidaires appelle, partout où c’est possible à échanger, se regrouper, converger, en restant clair·es sur nos valeurs : l’extrême-droite est l’ennemie des travailleuses et des travailleurs.
Créons les conditions d’un grand “toutes et tous ensemble” pour construire, par nos mobilisations, le rapport de force nécessaire pour imposer des hausses de salaires, pensions de retraites, minima sociaux et assurer un revenu agricole supérieur aux coûts de production. Nous n’aurons que ce que nous irons chercher ensemble.
PSA maintenant intégré, en alliance avec Fiat, à la multinationale Stellantis poursuit sa course « obsessionnelle » aux profits. En même temps que la mise à pied de 600 intérimaires dans l’usine de Mulhouse,et de 200 dans l’usine de Rennes, c’est le saucissonnage des congés que PSA veut installer dans toutes les usines du groupe en France.
Trois semaines de congé en été, sur les 5 qu’impose la loi, c’est un minimum pour vraiment se reposer et profiter de l’habituel beau temps de cette saison. Mais c’est trop pour la direction de PSA. Elle a annoncé dans la plupart des usines son intention d’imposer deux semaines de congé en été, la troisième étant à prendre en mai pour se cumuler avec les ponts de ce mois là.
En ces temps d’offensive patronale tout azimut, au moment où les salaires continuent de prendre du retard sur la hausse des prix et où les nouvelles grilles de classification métallurgie bouleversent positions et droits acquis, cette brutale remise en cause du droit aux congés est la mesure de trop qui fait déborder une colère contenue par la répression et les trop nombreuses défaites.
C’est dans toutes les usines PSA que ce saucissonnage des congés ne passe pas entraînant débrayages et mouvements de résistance qui dans certains cas réussissent à gagner usine par usine. Ces petites victoires obtenues dans certaines usines étant un encouragement aux luttes dans d’autres usines
Dès le 15 janvier 2024 une centaine de salariés de l’usine de Poissy s’était mis en grève pour se faire entendre.
Hier, vendredi 26 janvier un débrayage dans l’usine de Sochaux, d’une centaine de travailleurs, principalement du Montage, a réussi à obtenir le retrait de la mesure. Même refus général dans l’usine de Rennes où le retrait de la mesure a aussi été obtenu.
Dans l’usine d’Hordain, dans le Nord de la France, depuis vendredi 26 janvier, « plus de 500 salariés sur les 3 tournées se sont mis en grève pour refuser la proposition de la direction qui ne garantit pas d’avoir 3 semaines de congés consécutifs pour tous ceux qui le souhaitent » (information CGT).Les grévistes et les organisations syndicales ont reconduit le mouvement à lundi 29 janvier 2024 dès 5h30.
Et c’est aussi ce lundi 29 que la réaction des travailleurs de Mulhouse est attendu
Si, après quelques débrayages, la direction commence à reculer sur cette mesure, c’est qu’elle commence à craindre les réactions collectives. Ce serait alors surement le moment de s’y mettre tous ensemble pour la faire reculer sur le reste, les salaires, les conditions de travail …
Source : Auto-critique, actualité des luttes dans l’automobile
Le 7 décembre 2021, des travailleurs sans-papiers de l’agence Chronopost d’Alfortville (filiale à 100% de La Poste, groupe appartenant à l’Etat), ont démarré un nouveau piquet de grève devant cette agence. Ils se joignaient ainsi au piquet de grève installé à l’agence DPD (autre filiale de La Poste) au Coudray-Montceau (91et à celui de l’entreprise RSI (intérim BTP) à Gennevilliers.
Cette lutte, à Chronopost Alfortville, a pris le relais de celle qui, entre juin 2019 et janvier 2020, avait permis d’imposer la régularisation de 27 travailleurs surexploités par cette filiale de La Poste et ses sous-traitants, Derichebourg et Mission Intérim, et la régularisation de 46 autres travailleurs, d’autres sociétés, ayant activement participé à ce combat. Parmi les 83 travailleurs écartés de la régularisation à l’époque, nombreux poursuivent le combat dans le conflit actuel.
Dans leur lutte, les actuels salariés de Chronopost, comme les anciens du piquet de 2019, ont reçu le renfort de nombreux travailleurs sans-papiers d’autres entreprises, la plupart exploités dans les mêmes conditions, et présents depuis deux ans sur le piquet et dans les manifestations, pour exiger aussi leur régularisation. La Poste, patron de combat contre les sans-papiers !
Soutien financier à la lutte : Piquet Chronopost Alfortville https://www.cotizup.com/sans-
Le ministre Gabriel Attal poursuit l’œuvre de Jean-Michel Blanquer : réformes qui accentuent le tri social et désorganisent les écoles, collèges et lycées, suppressions de postes, dégradation des conditions de travail, gestion par l’évaluation, mépris envers les personnels, salaires insuffisants !
Les personnels de l’Éducation nationale savent que pour arracher des augmentations salariales, de meilleures conditions de travail et faire barrage aux contre-réformes, il faut imposer un rapport de force, la grève est notre meilleure arme.
La loi Immigration votée le 19 décembre main dans la main entre la “majorité” présidentielle, la droite et l’extrême droite est un recul intolérable, SUD éducation exige son abrogation.
1- pour de vraies augmentations de salaires
Les mesures de revalorisation engagées l’an dernier, principalement pour les enseignant·es et CPE en début de carrière, sont très insuffisantes pour rattraper l’écart avec la rémunération moyenne des enseignant·es des pays de l’OCDE et des autres fonctionnaires de catégorie A. Pour 70 % des enseignant·es, la revalorisation s’est bornée à une augmentation indemnitaire de 95 euros par mois et à une trentaine d’euros induits par la hausse du point d’indice pour tou·tes les fonctionnaires. Ces mesures sont très insuffisantes au regard de l’inflation. La situation des personnels AESH et AED est alarmante : la maigre augmentation de salaire des AESH de septembre est bien loin de répondre à nos revendications : au final les salaires n’augmentent que peu et, pour les collègues aux plus bas échelons, c’est toujours une rémunération sous le seuil de pauvreté qui les attend à chaque fin de mois. Les temps incomplets imposés plongent les AESH dans la précarité. Pourtant, le ministère refuse toujours d’ouvrir le dossier du temps de travail et se borne à tenter d’imposer ses lubies de double employeur, augmentant par là les missions et la charge de travail des AESH.
SUD éducation revendique la reconnaissance d’un temps plein pour 24 heures d’accompagnement auxquelles s’ajoutent les heures connexes pour le travail de préparation, de suivi et de concertation !
SUD éducation revendique une augmentation immédiate de 400 euros pour toutes et tous, le SMIC à 2000 euros bruts, le rattrapage du point d’indice et une réduction des inégalités salariales, en particulier femmes/homme !
2- pour de meilleures conditions de travail
De Jean-Michel Blanquer à Gabriel Attal, les personnels subissent des réformes injustes, imposées dans la précipitation, qui participent à la dégradation des conditions de travail des personnels : la réforme du lycée professionnel, le démantèlement de la formation continue, la casse des groupes classe au collège… Ces réformes aggravent une situation alarmante : augmentation des tâches, des missions et du temps de travail, bâti scolaire dégradé et en partie amianté et inadapté à la crise écologique, absence de médecine du travail…
3- pour de vrais moyens et des créations de postes
Suite à la publication des derniers résultats de l’enquête Pisa sur le niveau scolaire des élèves de l’OCDE, le ministère a annoncé un “choc des savoirs” composé d’une compilation de mesures démagogiques à l’inefficacité prouvée et dont la mise en oeuvre va désorganiser complètement les collèges et aggraver la relégation sociale des élèves les plus en difficultés. Ce n’est pas en encourageant le redoublement, en mettant en place des groupes de niveau pour trier les élèves ou en sabordant le lycée professionnel que le ministre peut espérer réduire des inégalités sociales qui pèsent lourdement sur les trajectoires scolaires des élèves. Le ministre annonce 650 suppressions de postes dans les 1er degré.
Au contraire, SUD éducation porte des revendications pour lutter contre les inégalités sociales en améliorant les conditions d’études des élèves : baisse du nombre d’élèves par classe par le recrutement massif de personnels, développement de la formation initiale et continue des personnels, accompagnement médico-social des élèves, reconnaissance du métier d’AESH par la création d’un véritable statut…
SUD éducation revendique une baisse des effectifs par classe à 25 élèves en LGT, 20 en collège ordinaire, 16 en éducation prioritaire et en LP, ainsi qu’une baisse des effectifs globaux des établissements.
4- pour une école pour tou·tes les élèves
Macron a ordonné l’acte 2 de l’école inclusive pour augmenter le nombre d’élèves en situation de handicap à l’école, il oublie néanmoins tous les autres élèves qui dépendent de dispositifs d’inclusion : les élèves allophones et les élèves en grande difficulté scolaire. L’Éducation nationale ne donne pas les moyens aux personnels d’accueillir tous les élèves : il manque de personnels AESH, de moyens pour garantir l’accessibilité, de temps de concertation et de formation. Il faut d’urgence créer un vrai statut de la Fonction publique pour les AESH et arrêter la mutualisation de l’accompagnement.
Il y a urgence à convaincre que tou·tes les élèves ont leur place à l’école et que c’est bien à l’école qu’il revient de garantir des compensations du handicap afin d’en finir avec le validisme et la ségrégation scolaire et sociale.
SUD éducation appelle tous les personnels à se mobiliser pour gagner les moyens d’accueillir tous les élèves à l’école qu’importe leur handicap, leur origine ou leurs difficultés scolaires.
Le 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes reste aujourd’hui d’une brûlante actualité. Car tant qu’une seule femme sur la planète subira les effets du patriarcat (inégalités, sexisme, discriminations, etc.), la lutte des femmes sera légitime, et le féminisme nécessaire. Cette année le 8 mars tombe un vendredi et nous appelons déjà à construire une grève féministe d’ampleur au côté des associations féministes et d’une intersyndicale élargie qui appellera à la grève.
La grève féministe c’est à la fois la grève du travail rémunéré mais aussi de tout le travail invisible des femmes pour le fonctionnement de la société. Alors portons cette mobilisation partout : sur nos lieux de travail, sur nos lieux d’études, dans nos espaces militants, et dans l’ensemble de la société.
Petit tour d’horizon des mobilisations sociales dans le département… Liste forcément non-exhaustive, n’hésitez pas à nous transmettre vos infos à contact@solidaires78.org
Le personnel des urgences de cet hôpital des Yvelines a entamé une grève illimitée pour dénoncer le manque d’effectifs. La direction rétorque qu’il n’y a pas assez de passages aux urgences pour créer un poste d’infirmière de nuit.
Installé devant l’agence, un piquet permanent est tenu par les salariés de Chronopost, en grève, et par des dizaines de travailleurs sans papiers d’autres entreprises présents en soutien . Dans ce combat commencé en commun avec les grèves sur les piquets RSI à Gennevilliers (92) et DPD au Coudray-Montceau (91), les travailleurs du piquet Chronopost affrontent un système d’exploitation du travail sans-titre, basé sur la sous-traitance en cascade et le marchandage de main d’œuvre. Comme lors du premier conflit de 2019/2020, qui avait permis d’imposer la régularisation de 73 travailleurs, dont 27 Chronopost, les grévistes affrontent des employeurs particulièrement rodés et acharnés dans le déni, refusant de reconnaitre tout lien de travail avec les sans-papiers qu’ils recrutent pourtant abondamment. Ces entreprises bénéficient d’une protection insupportable des pouvoirs d’Etat. La Poste, entreprise publique, a érigé en modèle économique revendiqué ce système de dumping social. Les ministères, la préfecture, les services de l’Etat sont aux abonnés absents. Si au bout de près de 2 ans, quelques cartes de séjour ont été délivrées, aucune régularisation pour la très grande majorité du piquet.
Les travailleurs continuent donc leur mobilisation, en maintenant un rythme permanent de manifestations, de participation à de très nombreuses mobilisations interprofessionnelles, et en étant à la pointe dans la lutte contre la loi Darmanin qui vise l’immigration.
Pour soutenir les grévistes:
Le piquet est au 2 chemin de Villeneuve-ST-Georges, à Alfortville.
Cette formation s’adresse aux militant-es susceptibles de participer à la préparation de la grève du 8 mars 2024 et des actions autour. Elle s’adresse aux militant-e-s du privé comme du public.
Cette année nous avons fait le choix de nous concentrer sur la question de la construction de la grève au sein de Solidaires pour ce 8 mars, autour de discussions et ateliers sur de la préparation de la grève en se basant sur les remontées de terrain.
Comment faire dans chaque entreprise et secteur pour porter la question du 8 mars et nos revendications, avec force et créativité?
Comment faire pour porter encore mieux cette construction du 8 mars de grève dans nos syndicats, fédérations et solidaires locaux?
C’est ce à quoi nous nous attèlerons lors de cette journée qui se veut aussi conviviale et sororale.
Cette formation regroupe des militant-es de la CGT, de la FSU, et de Solidaires depuis 1998. Elle se veut un lieu d’échanges qui permet d’approfondir les questions revendicatives sur nos lieux de travail et de poser la question de la place des femmes dans les syndicats
Voici les différentes thématiques de l’édition 2024 :
L’intime est politique : refuser les normes esthétiques et les injonctions du paraître
Construire nos luttes féministes : mixité / non mixité ?
Nouvelles technologies et intelligence artificielle : nouvelles mais toujours sexistes !
Métiers du soin et du lien : un enjeu pour l’égalité
Organisme : CEFI Solidaires national
Lieu : Paris (Salle Olympe de Gouges)
Date de début :3 avril 2024
Date de fin : 4 avril 2024
Durée : 2 jours
Rappel pour vous inscrire à ces formations
Pas d’inscription individuelle : Inscriptions auprès des Solidaires locaux, fédérations et syndicats nationaux qui transfèreront au CEFI. Repas de midi et Transport pris en charge par le CEFI. Hébergement et repas du soir pris en charge par la structure inscrivante.
Email pour les inscriptions : inscriptionscefi@solidaires.org
Un livre : « Parce qu’ils sont arméniens », de Pinar Selek, paru aux Editions Liana Levi en 2015
Dans ce livre, Pinar Selek décortique comment elle a découvert qu’elle avait intériorisé les préjugés portés par la société turque contre les Arméniens et quel chemin elle a parcouru, pas à pas, grâce à plusieurs rencontres, pour s’en défaire.
Tout commence sur la façade de l’école primaire avec cette affirmation : « Heureux celui qui se dit turc ». Ou au collège, avec les discours de professeurs qui affirment de façon caricaturale que « les Turcs ont beaucoup d’ennemis : des communistes, des terroristes, des Arméniens », et pour eux, ces mots sont interchangeables.
Pinar Selek se demande pourquoi les filles arméniennes de son collège ne répondent pas aux insultes ? Elle réalise qu’elle a intériorisé leur résignation : « les Arméniens sont des froussards ».
Plus tard, elle constate qu’elle a oublié jusqu’à leurs prénoms et s’interroge : « que devient-on lorsqu’on oublie ? On s’habitue au mal ».
Grâce aux échanges avec Madame Ralin, elle a commencé à se poser des questions :
elle note l’absence de toute trace du génocide dans la littérature turque ;
elle réfléchit à la difficulté de prendre conscience des avantages de ne pas être arménien ;
elle s’aperçoit qu’être arménien revient à être réduit au silence, à l’invisibilité pour être toléré, mais sans aucune garantie.
C’est par l’amitié de l’Oncle Niṣam, pendant son séjour en prison, qu’elle réalise que « la souffrance se mue en résistance ». Quand il lui dit « ce n’est pas bien qu’on nous voit ensemble, cela pourrait te nuire », elle a eu honte de n’avoir pas pleinement pris conscience de ce qui se passait autour d’elle.
La rencontre avec Hrant Dink, fondateur du journal bilingue arménien et rurc, Agos (Le Sillon), dont le premier numéro paraît le 5 avril 1996, lui fait se poser une question majeure : « Où sont les Arméniens ? », question qui revisite la définition du citoyen arménien, mais aussi celle du citoyen turc. C’est aussi grâce à Hrant Dink qu’elle se rend compte qu’il n’est pas aisé de se départir d’une identité arrogante, provenant de ce préjugé qui construit une hiérarchisation entre les peuples.
En 2003, elle participe à l’organisation d’une de femmes en Turquie, qui collecte des missives de toutes les régions et dont l’arrivée a lieu à Konya au centre du pays. La missive de Hay Gin (unique collectif féministe arménien à Istanboul) attire son attention : « Sur les routes que vous avez traversées, nous existions autrefois » et elle en conlut que « l‘image altérée des Arméniens que j’avais se déchire pour de bon ».
Le 19 janvier 2007, Hrant Dink est assassiné de trois balles dans la tête ; l’enquête criminelle a montré la complicité des services de police et l’implication de hauts dignitaires turcs.
A son enterrement, plus de 300 000 personnes scandent « Nous sommes tous des Arméniens »… et, avec la disparition de son ami, Pinar Selek a « enterré l’arrogance ».
Elle nous montre le chemin pour se défaire des préjugés : il ne suffit pas de savoir, il faut aussi s’arrêter, prendre de la distance, réfléchir. Elle propose que « les avenues qui portent le nom des responsables du génocide arménien soient rebaptisées Hrant Dink ».
Ce livre est très important car il montre combien il est difficile d’analyser les préjugés qui construisent notre identité, que nous intériorisons malgré nous, et le chemin à parcourir pour les déconstruire et s’en défaire. Ses reflexions pourraient servir par exemple aux hommes militants, qui se posent des questions sur des relations égalitaires avec les femmes et ne voudraient pas faire partie du clan des machos et masculinistes : comment questionner la hiérarchisation des sexes, la construction de l’identité virile par la violence et la mise en concurrence, « le masculin qui l’emporte sur le féminin » dans la langue française depuis tant d’années ! En s’inspirant de la vidéo de Carole Roussopoulos « Christiane et Monique – LIP V»1, on pourrait lire ce livre en remplaçant « turc » par « homme » et « arménien » par « femme » … Ou encore arabes par juifs, personnes à la peau claire par personnes à la peau foncée, personnes valides par personnes handicapées, féministes occidentales par féministes d’autres régions du monde, etc… Car personne n’échappe aux préjugés mais il ne tient qu’à nous de les combattre, individuellement et collectivement !
Elisabeth GIGANT-CLAUDE
D’autres ouvrages à découvrir :
Service militaire en Turquie et construction de la classe de sexe dominante. Devenir homme en rampant. Pinar Selek. Editions L’Harmattan, 2014 L’autrice étude les différents mécanismes à l’œuvre pour formater les individus : dépersonnalisation, violence, soumission, absurdité et arbitraire d’ordres auxquels les jeunes appelés ne peuvent se soustraire, nationalisme et culte du pouvoir, de la force.
L’insolente. Dialogues avec Pinar Selek. Guillaume Gamblin. Editions Cambourakis, 2019 Dans ce livre, elle revient sur son parcours, son enfance, ses combats auprès des opprimé·es : avec les enfants des rues d’Istanbul, les prostituées, les Kurdes, les Arménien·nes. Elle raconte la torture et la prison, mais aussi la création d’un atelier des artistes de rue, d’une coopérative féministe ou d’une plateforme d’écologie sociale. Aujourd’hui exilée en France, elle poursuit ses recherches universitaires, mais elle continue avant tout son combat pour décloisonner les luttes et ouvrir des voies créatives vers une autre société. Guillaume Gamblin, qu’elle a connu à Lyon dans le milieu alternatif et qui est devenu son ami, nous invite, à partir d’entretiens, à rencontrer cette « femme aux mille vies » à l’énergie contagieuse.
Le Chaudron militaire turc. Un exemple de production de la violence masculine. Pinar Selek. Editions des femmes, 2023 Avec ce nouveau livre qui réarticule les éléments de ses recherches précédentes, Pınar Selek élargit sa réflexion, nourrie de références philosophiques à nos sociétés toutes entières, régies par un capitalisme effréné et un mépris à l’égard des femmes dans un contexte mondial de guerres et une montée des régimes autocratiques.