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Dans le privé et le public, un syndicalisme de lutte pour la transformation sociale

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Actu Solidaires 78 Éducation

Mobilisation lycéenne : quoi de neuf à Saint Ex ?

Depuis une semaine, une vingtaine de lycéen·nes de St Exupéry à Mantes la jolie, forment un mur humain devant le portail de leur établissement scolaire.
« – Ce blocus se veut d’une part partiel, les étudiant·es en prépa et BTS peuvent entrer et d’autre part pacifique, aucune dégradation ni violence verbale ou physique ne sera toléré dans ce mouvement lycéen·nes ». témoigne un lycéen.
Cette mobilisation à pour objectif de dénoncer les conditions du passage des épreuves du BAC : « – Nous voulons être pris·ses au sérieux et être écouté·es, nous venons de vivre deux confinements, des cours en présentiels, distanciels, des périodes très difficiles des difficultés de connexion  et nous sentons un écart se creuser entre la réalité des examens et la réalité du terrain », témoigne un autre lycéen.

Le mouvement  est compris par les lycéens·nes de seconde, qui ne cachent pas leur solidarité envers leurs camarades, d’ailleurs personnes ne cherchent à rentrer dans l’établissement, les secondes sont tout autant touchées par cette période de stress et d’inquiétude.


Sur le lieu du blocus partiel et afin de veiller à ce que tout ce passe bien des profs, les CPE, le directeur adjoint et les représentantes de parents d’élèves sont présent·es.
« – Nous avons tous et toutes  l’image de nos jeunes agenouillé·es par la police; nous sommes présent·es pour veiller à ce que plus jamais notre jeunesse ne  soit agenouillée et puissent s’exprimer librement et sereinement », témoigne une maman.

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Lutter contre le sexisme dans l’Éducation nationale : ressources et analyses

Lutter contre le sexisme dans l’Éducation nationale : ressources et analyses – Une brochure de SUD éducation

Si elle a connu dans les 20e et 21e siècles des avancées significatives quant aux droits et au statut des femmes, notre société est toujours porteuse d’inégalités et de discriminations à l’encontre des femmes et des personnes LGBTQI. Syndicat de lutte et de transformation sociale, SUD éducation veut être de tous les combats qui se jouent au sein de l’école contre les discriminations et inégalités découlant du système de domination patriarcale et hétérosexiste, traduites par les stéréotypes de genre. Ces combats concernent tous les acteurs et toutes les actrices des écoles et établissements.

Comme ailleurs, les discriminations sont effectives dans notre champ professionnel. Dans l’Éducation nationale, à ancienneté égale, le salaire des femmes progresse moins vite que celui des hommes. Cet écart de salaire se répercute au moment de la retraite. Par ailleurs, le métier est largement féminisé mais la hiérarchisation patriarcale se reproduit : les postes de direction sont largement masculins (à plus de 75%), et plus on avance dans le système scolaire vers des postes plus valorisés socialement, moins il y a de femmes (elles sont 83% chez les PE, mais seulement 35% à l’université). De plus, comme sur tout lieu de travail, l’Éducation nationale n’échappe pas aux problématiques de harcèlement à l’encontre de tous les personnels féminins (enseignantes, agentes, AED…). Enfin, les personnels reçoivent peu de formation sur les questions de genre et sur les moyens de mettre en œuvre des pédagogies ou des pratiques de travail antisexistes et anti-LGBTQIphobes. La domination patriarcale n’est pas la seule forme de domination qui pèse sur les individu-e-s : capitalisme et division de la société en classes sociales, racisme et discriminations/stigmatisations, traditionalisme et obscurantisme, viennent confluer avec patriarcat et hiérarchisation hétérosexiste. Il est nécessaire de penser ces formes de domination comme articulées les unes aux autres. Cette imbrication doit influer sur nos stratégies de lutte et sur notre vigilance militante pour que le féminisme ne soit pas instrumentalisé, notamment au service d’argumentaires xénophobes qui détourneraient ou confisqueraient sa lutte, qui oeuvre pour l’émancipation de toutes et tous.


Précarisation des femmes et inégalités salariales

Le gouvernement avait annoncé vouloir faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une grande cause du quinquennat. Comme pour le reste, Macron et son gouvernement communiquent sans jamais passer aux actes. Pire, en continuant sa politique de régressions sociales, la casse des services publics et la ruine du système de protection sociale, le gouvernement, comme les précédents, organise l’aggravation de la précarité des femmes. Cela a de graves conséquences notamment dans l’Éducation nationale qui est un des deux ministères les plus féminisés avec 72% de femmes. Les professeur-e-s des écoles sont 83% de femmes.

Assez d’inégalités salariales

Les travailleuses de l’Éducation nationale subissent le sexisme de l’institution dans l’évolution de leur carrière. Dans la Fonction publique, 23% des femmes fonctionnaires sont à temps partiel, contre 6% des hommes. Cela a des conséquences sur la rémunération et sur l’avancement.

Quelques chiffres soulignent les inégalités de salaires :

• Pour la retraite, au 31 décembre 2018, le montant moyen des pensions mensuelles brutes de droit direct pour les femmes était de 2 063 euros et de 2 449 euros pour les hommes ;

• En 2017, le salaire net mensuel moyen dans la Fonction publique d’état est de 2 408 euros pour les femmes et de 2 785 euros pour les hommes.

Les salaires et calcul de pension

La contre-réforme des retraites, dont le projet n’est pas abandonné mais seulement reporté, creusera encore plus les inégalités.

Le projet de contre-réforme repose sur un changement majeur : le calcul de la pension sur l’intégralité de la carrière au lieu des 6 derniers mois pour le public et des 25 meilleures années pour le privé actuellement. Cela imposerait un taux de remplacement inférieur à 60% sur le salaire moyen de l’intégralité de la carrière ; c’est très inférieur aux 75% du dernier traitement dans la Fonction publique ou des 25 meilleures années dans le privé. Ce changement de calculs a pour effets principaux de diminuer globalement les pensions et de pénaliser les carrières heurtées. C’est en particulier le cas des femmes, conduites à arrêter momentanément de travailler ou à se mettre à temps partiel pour assumer l’éducation des enfants.

Le gouvernement a pour projet d’ajouter un prétendu âge d’équilibre fixé initialement à 64 ans, amené à reculer encore pour les générations suivantes (jusqu’à 66 ans pour la génération 1987). Il faudra donc travailler encore plus tard pour ne pas subir de décote.

La division sexuelle du travail dans l’Éducation nationale

La sociologue Danièle Kergoat la définit comme la forme de division du travail social découlant des rapports sociaux entre les sexes : « elle a pour caractéristiques l’assignation prioritaire des hommes à la sphère productive et des femmes à la sphère reproductive ainsi que, simultanément, la captation par les hommes des fonctions à forte valeur ajoutée (politiques, religieuses, militaires, etc…) ».

Elle a des conséquences concrètes sur les personnels féminins en ce qui concerne les disparités d’avancement, de salaires, d’affectations, de souffrance au travail, et de précarité.

Ainsi, les personnels d’encadrement sont, proportionnellement, majoritairement des hommes. Le personnel de direction de l’administration centrale du ministère de l’Éducation nationale comprend 52 % de femmes.

Plus le public auquel on s’adresse est jeune plus la profession est féminisée. Ainsi 83% des enseignant-e-s du primaire sont des femmes alors qu’elles ne sont que le tiers des effectifs des enseignant-e-s à l’université. Or le salaire des enseignant-e-s du supérieur est en moyenne plus élevé.

Les femmes toujours en première ligne face aux crises

Dès la fin du confinement du printemps 2020, les agent-e-s d’entretien ou administratif-ve-s, les AED et les AESH, qui sont le plus souvent des femmes, ont dû et doivent encore parfois faire face à des pressions hiérarchiques tentant de les obliger à venir sur leur lieu de travail même lorsqu’elles sont exposées à un risque de contamination évident. En effet, quand les équipements de protection (gel, gants, masques) manquent, elles doivent tout de même assurer leurs missions qui peuvent les mettre en situation très précaires face au virus.

De plus, les femmes doivent faire tenir de multiples journées en une. Ainsi, elles effectuent la majorité du travail domestique pour lequel elles ne perçoivent bien sûr aucune rémunération. Elles ont dû et doivent encore gérer la vie quotidienne du foyer. Selon une étude de l’Insee effectuée en 2012, les femmes font 72 % des tâches ménagères et prodiguent 65 % des tâches parentales hors période de confinement.

Ces pourcentages ont augmenté dans la situation de crise comme l’a prouvé l’enquête commandée par le Secrétariat d’État chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations sur “l’impact du confinement sur les inégalités entre les femmes et les hommes en matière de répartition des tâches au sein des foyers”. Cela a exposé les femmes à une forte augmentation de la charge mentale. Les femmes sont aussi les principales pourvoyeuses d’aide aux personnes âgées qui leur sont proches. Or, on sait que cette catégorie de population est particulièrement vulnérable à la Covid-19.

L’égalité professionnelle : Qu’est-ce qu’on attend ?

L’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la Fonction publique prévoit l’élaboration d’un plan obligatoire qui devrait être effectif en décembre 2020. L’employeur doit mettre en place des mesures concrètes pour résorber les écarts de salaires entre femmes et hommes, notamment en travaillant sur “l’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle”. Or en l’absence d’un service public de la petite enfance efficace, c’est trop souvent aux femmes qu’incombe la responsabilité de prendre un congé parental ou de travailler à temps partiel. Cet état de fait a bien sûr de lourds effets sur la rémunération. Pour l’instant aucune mesure n’a été prise pour mettre en oeuvre ce projet.


Violences sexuelles et sexistes au travail

Aucune mesure n’a été mise en place ni pour prévenir les violences sexistes et sexuelles au travail ni pour accompagner les victimes. Chaque jour, en France, des femmes sont victimes de violences psychologiques, verbales, économiques, médicales, physiques ou sexuelles. Tous les deux jours, une femme est assassinée par son conjoint ou ex-conjoint : 146 féminicides en 2019 (en augmentation par rapport à 2018 où l’on avait recensé 121 féminicides).

Aujourd’hui dans l’Éducation nationale, on peut harceler ou agresser sexuellement en toute impunité. Pourtant la circulaire du 9 mars 2018, qui prévoit la protection des victimes de violences sexistes et/ou sexuelles dans la Fonction publique, existe. Elle dégage trois axes : la prévention, le traitement des violences et enfin les sanctions pour leurs auteurs (il s’agit de façon écrasante d’hommes qui sont incriminés). Cette circulaire n’est pas appliquée : les collègues qui ont dénoncé les violences subies n’ont bénéficié ni de protection ni d’accompagnement convenables. Pourtant l’employeur est responsable de la santé et de la sécurité des agent-e-s sur leurs lieux de travail ! SUD éducation revendique l’application de cette circulaire.

Violences sexistes et sexuelles : des chiffres inquiétants !

Les violences à l’encontre des femmes ne se bornent pas à la sphère privée comme le montre le Défenseur des droits : 1 femme sur 5 affirme avoir vécu des situations de violences au travail et seulement 5 % des femmes portent plainte pour dénoncer des violences qui ont lieu dans la sphère professionnelle. Ces violences qui comprennent les insultes, les discriminations, le harcèlement, les menaces, le chantage, mais aussi les agressions physiques et sexuelles, doivent cesser. Parmi les victimes de ces violences, les femmes célibataires, bisexuelles, lesbiennes et trans sont plus exposées au harcèlement. Dans le cadre du travail, les ouvrières et les salariées précaires et dans une moindre mesure les professions intermédiaires subissent une pression sexuelle plus intense que celle des autres catégories sociales.

La circulaire du 9 mars 2018 prévoit un accompagnement pour les victimes de violence, or il n’a jamais lieu. Une victime qui demande la protection fonctionnelle après avoir déposé plainte pour viol à l’encontre d’un agresseur, doit attendre un mois pour obtenir une simple réponse de l’employeur. De même, quand des collègues dénoncent du harcèlement sexuel, l’employeur préfère leur proposer de changer d’établissement.

L’Éducation nationale se cache derrière l’inaction de la justice en matière de lutte contre les violences sexuelles pour ne pas agir. Pourtant 16 % des femmes subissent des viols ou des tentatives de viol. 93 000 femmes ont été violées en 2017, parmi elles seules 10 % ont porté plainte et seulement 10 % de ces plaintes ont abouti en Cour d’assises. Une part importante des plaintes pour viols ne sont pas instruites aux assises comme les autres crimes mais en correctionnelle comme un simple délit.

La circulaire du 9 mars 2018 rappelle aussi que « L’obligation de protection des agents s’impose à tout employeur public ». Ainsi, les agent-e-s des collèges et lycées relevant des collectivités territoriales doivent aussi pouvoir bénéficier d’un accompagnement et de protection.

L’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la Fonction publique s’appuie notamment sur cette circulaire pour “ renforcer la prévention et la lutte contre les violences sexuelles et sexistes”. Cependant, aucune mesure concrète n’est prise pour faire de ce projet une réalité. Par exemple, la mise en place des cellules d’écoute psychologique pour les victimes n’est pas effective. L’employeur avait pourtant affirmé qu’il y en aurait dans toutes les académies.

Harcèlement sexuel : comment le repérer ?

Le harcèlement sexuel peut se manifester par des propos ou gestes à connotation sexuelle, par une attitude particulièrement insistante malgré des refus répétés ou encore par des propositions de nature sexuelle. Deux types de harcèlement sexuel sont distingués : celui qui repose sur la répétition d’actes de harcèlement et celui qui résulte de la commission d’un seul acte.

SUD éducation revendique l’application de la circulaire du 9 mars 2018 qui prévoit :

-une campagne de prévention des violences sexistes et sexuelles dans la Fonction publique  : des formations pour tous les personnels notamment pour les représentan-t-e-s du personnel, ainsi que pour les personnels d’encadrement qui ont tendance à oublier leurs obligations.

-des dispositifs d’information, de communication et de sensibilisation auprès de l’ensemble des personnels avec la diffusion d’un numéro vert, le rappel de la loi, l’organisation de réunions de sensibilisation.

-la définition et la mise en œuvre d’un dispositif de signalement et de traitement des violences sexistes et sexuelles : ce dispositif est aujourd’hui inexistant ! Les signalements des personnels restent sans réponse de l’administration.

-la protection et l’accompagnement des victimes : l’employeur a la responsabilité de protéger les personnels : « une fois informée des agissements répréhensibles, l’administration doit mettre en œuvre toute action appropriée pour éviter ou faire cesser les violences auxquelles l’agent victime est exposé, même lorsqu’aucune procédure judiciaire n’est enclenchée  ». Elle peut prendre une « mesure interne de changement d’affectation voire suspension de la personne présumée agresseur dans l’attente du conseil de discipline ». Circulaire du 9 mars 2018.

-de sanctionner les auteurs des violences : aujourd’hui, bien souvent l’administration se contente de déplacer soit la victime soit l’auteur des violences ou attribue une sanction parmi les plus basses aux auteurs de violences sexistes ou sexuelles. Pourtant la circulaire indique que « les employeurs se doivent d’être exemplaires dans la sanction des violences sexuelles et sexistes ». « Les actes constitutifs de violences sexuelles ou sexistes doivent être sanctionnés par le biais de la procédure disciplinaire et/ou par le juge pénal. Ils peuvent également donner lieu à une indemnisation par le juge civil. Les procédures disciplinaires, administratives et pénales sont indépendantes les unes des autres. ». Circulaire du 9 mars 2018.


Le 8 mars : une journée internationale de lutte des femmes

En 1910, une centaine de femmes de dix-sept pays différents se rassemblent à Copenhague pour la deuxième conférence des femmes socialistes. Ces militantes appartiennent à l’Internationale socialiste des Femmes, organisation sœur de l’Internationale socialiste. Clara Zetkin y propose une motion soulignant la nécessité d’une « journée internationale des femmes » qui est votée à l’unanimité. Ce moment de lutte est réfléchi comme international, car ces militantes, en tant que socialistes, insistent sur la nécessaire solidarité de classe pour gagner contre le capitalisme et l’impérialisme. La classe ne connaît pas de frontière. De la même manière, les femmes sont exploitées au-delà des délimitations nationales, la lutte contre le sexisme est internationale. Les objectifs de cette journée de lutte sont l’obtention du droit de vote, du droit de travailler librement, le combat contre les violences sexistes au travail. Plus généralement, les revendications portent sur l’égalité économique, juridique et politique des femmes.

Il n’y a pas de date précise proposée au départ. Le 8 mars est choisi après la révolution russe.

Une histoire de grève de travailleuses qui a contribué à déclencher une révolution

En effet, au début de l’année 1917, les ouvrières et les ouvriers de Petrograd, notamment, se mettent en grève pour dénoncer la guerre et la pénurie de pain. Le 23 février (8 mars du calendrier moderne), des ouvrières en grève manifestent pour leurs droits, pour des conditions de travail et de vies décentes. Les ouvriers des industries leur emboîtent le pas, les grèves se généralisent. Les travailleuses et les travailleurs s’arment alors pour affronter la police et l’armée. Elles et ils gagnent contre le Tsar et mettent à bas son régime autoritaire.

Un moment de lutte contre la récupération du combat pour les droits des femmes par les institutions capitalistes et de l’État

Les mouvements féministes de la deuxième vague (qui débutent dans les années 1960) investissent alors la date du 8 mars. En 1975, le Mouvement de Libération des Femmes (MLF) s’en sert notamment pour manifester contre l’Année internationale de la femme organisée par l’ONU.

L’oppression spécifique des femmes se trouve au croisement de l’exploitation capitaliste subie par tous les travailleurs et toutes les travailleuses et l’exploitation sexiste qui résulte d’inégalités sociales liées aux genres. Elle se trouve aussi à l’intersectionnalité du racisme et des discriminations subies par les personnes LGBTQI.

Les syndicats vecteurs de progrès social se sont saisis et se saisissent encore du 8 mars pour lutter contre le sexisme.

Un moment de lutte pour l’émancipation des femmes et pour la destruction du patriarcat

La grève du travail salarié est un moyen pour les femmes de montrer qu’elles ne sont pas dupes et que l’égalité professionnelle est encore à conquérir. La lutte féministe a pour objectif de renverser toutes les structures de domination.

La lutte féministe est intersectionnelle : la libération des femmes doit se faire au profit de toutes, et pas seulement au profit de quelques-unes et au détriment d’autres.

La grève du travail domestique et des soins aux personnes dépendantes est une manière de mettre en évidence le fait que ce sont les femmes qui font majoritairement ces tâches largement invisibilisées, méprisées et naturalisées.

C’est aux femmes elles-mêmes de récupérer leur dignité mise à mal par les injustices, les violences et le mépris qu’elles subissent en manifestant. Le 8 mars est une journée de combat pour l’émancipation des femmes et leur visibilisation.


Sexisme et manuels scolaires

Outils de travail quotidien pour les élèves et les enseignant-e-s, les manuels scolaires sont bien souvent les vecteurs de représentations stéréotypées et sexistes. Ils contribuent par là à perpétuer un ordre patriarcal synonyme de discriminations.

Le Centre Hubertine Auclert a produit de nombreuses études analysant les représentations sexuées dans les manuels d’histoire, de français, de mathématiques. Ces études permettent de mieux comprendre les biais sexistes de nombre de manuels.

Une sous-représentation des femmes

Les femmes sont très peu présentes dans les manuels. Seulement 3,2 % des biographies des manuels d’histoire sont consacrées à des femmes. Minorées comme actrices de l’histoire, elles sont aussi minorées comme autrices de documents-sources  : près de 96 % des documents présentés dans les manuels scolaires d’histoire ont pour auteur un homme !

Le constat dans d’autres disciplines est tout aussi édifiant : les autrices proposées à l’étude dans les manuels de français ne représentent que 5 % de l’ensemble  ! Cette sous-représentation concerne tous les domaines  : scientifique, artistique, politique. Dans les manuels d’EMC, on trouve seulement 15 % de femmes dans le domaine relevant de la politique.

Le clitoris absent des manuels de SVT

Depuis 2011, les manuels de SVT ont introduit la notion de genre et initié ainsi une prise en compte du construit social dans la formation des identités sexuées. Si on peut se réjouir de cette avancée, on peut encore relever des aspects problématiques dans les manuels de SVT.

Ainsi, certains manuels ne daignent pas mentionner/représenter le clitoris, et à la rentrée 2017, seul un manuel sur huit le représente correctement, à savoir comme un organe de dix centimètres, qui ne se limite pas à sa partie externe. Cela n’est pas sans conséquence quant à la méconnaissance des jeunes filles de leur propre corps et du plaisir sexuel féminin.

De plus ces manuels de SVT invisibilisent le plus souvent les variations intersexes (qui ne correspondent pas aux définitions binaires type des corps masculins ou féminins) en présentant les sexes biologiques masculin/féminin comme binaires, bien délimités et en miroir… alors que les travaux scientifiques récents, comme ceux d’Anne Fausto-Sterling, montrent qu’il est plus pertinent de dépasser une vision binaire et de parler de continuum des sexes, tant les facteurs qui définissent le sexe biologique (génitaux, gonadiques ou chromosomiques) peuvent varier et se combiner différemment. Par ailleurs, quand les variations intersexes sont évoquées, elles le sont sous l’angle pathologique, comme des «malformations» ou des «dysfonctionnements».

Ressources antisexistes alternatives

Sur internet, le site du Centre Hubertine Auclert fournit de nombreux outils, de même que les sites Genrimages (outils d’analyse d’image), Matilda (courtes vidéos) ou le site du Centre Simone de Beauvoir.


L’écriture inclusive

L’écriture inclusive est un moyen de remettre en cause la domination patriarcale qui se manifeste jusque dans le langage.

L’écriture inclusive est une écriture qui n’invisibilise personne et permet de prendre en compte véritablement tout le monde, y compris les personnes non binaires qui ne s’identifient ni comme hommes ni comme femmes.

Un peu d’histoire…

En France, l’écriture inclusive est née de l’idée que l’on ne voulait plus utiliser le masculin dit générique pour parler indifféremment de toute personne. C’est un système d’écriture qui a été trouvé pour donner une égale visibilité à tou-te-s dans la langue écrite, pour que chacun-e ait une égale importance.

À l’heure actuelle, il n’y a pas d’unification. On peut utiliser des traits d’union, des barres obliques, des points bas, des points hauts, des points médians.

L’expression « écriture inclusive » est assez récente et est encouragée par le Haut conseil à l’Égalité (HCE) qui a publié en 2015 un guide pratique « pour une communication sans stéréotypes » : « Une langue qui rend les femmes invisibles est la marque d’une société où elles jouent un rôle second. C’est bien parce que le langage est politique que la langue française a été infléchie délibérément vers le masculin durant plusieurs siècles par les groupes qui s’opposaient à l’égalité des sexes ».

On peut très bien dire pour parler de l’ensemble de la population « les Français et les Françaises  » mais on emploie généralement « les Français » pour désigner l’ensemble car on pense que ça suffit pour comprendre. Or les formes féminines et masculines existent : ce n’est donc pas forcément la langue qui est discriminante mais c’est la manière dont on l’utilise. Notons que l’expression « les Français et les Françaises » n’est pas satisfaisante en soi, car elle pose une partition binaire qui exclut les personnes intersexes et non-binaires. Donc l’écriture inclusive cherche par une graphie plus rapide à faire exister les activités humaines sous une forme qui englobe tout le monde (les « français-es »), sans avoir recours au masculin dit générique. Le masculin n’est pas neutre lorsqu’il s’agit de parler d’êtres humains.

La grammaire inclusive et pourquoi il est dangereux de dire que le masculin l’emporte

La grammaire inclusive, c’est :

la féminisation des noms de métiers ;

l’accord de proximité ;

l’accord en fonction du nombre ;

Un exemple d’invisibilisation révélateur.

Le mot « autrice » a existé avant le XVIIe siècle. À partir du XVIIe, « autrice » a disparu, condamné par des grammairiens.

Auparavant les accords se faisaient au gré de chacun-e, comme c’était le cas en latin. C’est au XVIIe siècle que cette règle du « masculin qui l’emporte sur le féminin » s’est imposée car les grammairiens étaient des hommes qui ont érigé le masculin en genre plus noble en se justifiant par des arguments patriarcaux et essentialisants : « Le masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle » (Beauzée, Grammaire générale… 1767).

La volonté de domination patriarcale se reflète dans la normalisation et l’évolution de la langue. De plus, au cours des siècles, se généralise l’utilisation du masculin à valeur générique comme « Homme » au singulier ou au pluriel pour désigner tous les êtres humains…mais dans les faits, cette règle conduit à invisibiliser le féminin et à placer le masculin au centre de toutes nos projections mentales. On note également une absence de féminisation des noms de métiers qui n’existent qu’au masculin, y compris dans les manuels scolaires (« un savant», « un humaniste »…). Et répéter cette formule grammaticale, « le masculin l’emporte sur le féminin » aux enfants à partir de 7 ans induit des représentations mentales qui conduisent à accepter la domination masculine, et une partition binaire des genres. Cette maxime patriarcale, devenue règle grammaticale, doit être mise au ban de l’école.

Par l’enseignement de la langue et la grammaire, le féminin est relégué à une position subalterne.

De la nécessité de voir le langage comme une manifestation sexiste parmi d’autres

L’emploi de la langue est une manifestation parmi d’autres du sexisme. Différence de salaire, inégale répartition des tâches ménagères, publicités sexistes, discrimination à l’emploi, harcèlement de rue, agressions sexuelles, harcèlement sexuel sur le lieu de travail, violences conjugales, injonctions vestimentaires, viols et langage sexiste font partie d’un même système. Il ne faut pas minimiser le combat de la langue et il faut attaquer le sexisme sous plusieurs angles. Ainsi l’écriture et la grammaire inclusives remettent aussi en question la position inégalitaire des femmes dans la société. L’écriture inclusive permet aussi, par des formes écrites qui englobent en une seule formule masculin et féminin, de sortir d’une langue binaire soit masculine soit féminine, et inclure par là toutes les personnes qui ne se reconnaissent pas dans cette partition binaire. Il est nécessaire de chercher un langage non sexiste pour tenter de réduire les inégalités ou violences faites aux femmes, et à tout-e-s les personnes qui ne se reconnaissent pas dans la partition binaire des genres. C’est au sein de l’école que beaucoup de choses se jouent, c’est par l’éducation des plus jeunes que le système sexiste pourra être modifié. C’est une lutte idéologique qu’il faut mener, et le langage est aussi un enjeu de cette lutte.


Mixité / Non mixité, quels outils de lutte ?

Quelques rappels

La pratique de la non-mixité fait partie intégrante de l’histoire du mouvement féministe.

Son utilité et sa raison d’être ont été notamment explicitées par la génération fondatrice du Mouvement de Libération des Femmes, Christine Delphy en tête, notamment dans son texte Nos amis et nous, écrit en 1977 et publié aujourd’hui dans L’ennemi principal. Hors du champ féministe, elle a aussi été revendiquée par d’autres mouvements d’émancipation collective, comme par exemple aux Etats-Unis le mouvement pour les droits civiques mené par les Afro-Américain-e-s.

Non mixité ET mixité choisies

Tant que subsisteront toutes les formes d’oppression (patriarcale, raciste, LGBTQIphobe), la non-mixité apparaîtra comme un outil utile. Mais si elle constitue la voie de l’émancipation, elle n’en est pas son horizon. Sa pratique, nécessaire, est aussi indissociable d’une convergence des luttes synonyme de mixité choisie.

De l’importance d’une non mixité choisie

Un constat : notre époque est celle de la non-mixité subie et de la mixité sans égalité.

• Le système patriarcal exclut les femmes de la société politique, économique ou médiatique (malgré une mixité apparente) tant au niveau national qu’international (gouvernement, hauts cadres administratifs, ONU, OCDE…) ou exclut les femmes des postes décisionnels dans des associations, clubs de sport ou autres ;

• Au sein des familles, il n’y a pas d’égalité femme-homme (violences conjugales, inégalité dans la prise en charge des tâches ménagères et de l’éducation des enfants) ;

• La parité numérique (50 % d’hommes/50 % de femmes) est un leurre car certaines professions sont beaucoup plus féminisées que d’autres ;

• La mixité à l’école, certes obligatoire depuis 1975, est censée offrir la même éducation à toutes et tous, mais telle qu’elle est pratiquée, elle reproduit les conditionnements sexués existants dans la société.

La non-mixité choisie permet aux femmes de se libérer

C’est aux femmes qui subissent de s’auto-émanciper car ce ne sont pas les hommes qui, ayant une position de dominants, vont lâcher de leur pouvoir, ce n’est pas à eux de dire comment les femmes doivent s’émanciper. Les femmes choisissent la non-mixité car :

Elle libère la parole, la sécurise, permet une sorte d’empowerment ( aux personnes opprimées de parler, de prendre l’espace, de parler mieux, de parler sans se faire sans cesse couper la parole, de se comprendre, mieux qu’en présence de personnes dominantes).

Elle permet aux femmes une prise de conscience de leur statut de dominées, en échangeant, elle voit les multiples facettes de l’oppression patriarcale.

La non-mixité est une stratégie de résistance politique à des dominations structurelles telles que le racisme ou le sexisme.

C’est un moyen de signifier aux hommes qu’ils doivent prendre conscience de leur place de dominants.

Investir des temps de non-mixité choisie est ainsi la base de toute lutte d’émancipation.

La mixité choisie (ou plus exactement : la possibilité de choisir – ou pas – la mixité) constitue un objectif pour les dominé-e-s, le chemin qui y mène passe nécessairement par des moments de non-mixité choisie.

• La mixité dans notre société est vue comme un progrès social mais elle n’attaque pas le patriarcat, elle n’est pas synonyme d’égalité : les stéréotypes de genre et les comportements sexistes ont la vie dure. L’égalité entre femmes et hommes par contre est un principe inaltérable.

• La mixité doit être un atout pour la convergence de toutes les luttes d’émancipation. Mais dans cette convergence, les allié-e-s ne doivent pas se substituer au groupe opprimé pour fixer modalités d’action et revendications. La mixité dans son sens large (mixité entre les sexes, mixité racisé-e-s-blanc-he-s), est indispensable au fonctionnement de notre société, et elle est de toute façon inhérente à chaque lutte.

Et ailleurs aujourd’hui ?

L’expérience des femmes Kurdes de Kobanê

La stratégie du mouvement des femmes consiste à la fois à promouvoir l’organisation non-mixte des femmes à tous les niveaux, et à assurer parallèlement une participation

égalitaire dans les structures mixtes.

En 2014, le Rojava déclarait son autonomie. Les femmes de Kobanê participaient à la mise en place d’un système d’égalité de genre inédit avec pour principes la co-présidence à tous les niveaux décisionnels et les assemblées autonomes de femmes au sein de chaque instance politique.

Lorsque le quota -40 % de femmes- n’est pas respecté, alors l’assemblée est annulée, ou alors les femmes ne sont pas tenues de respecter les décisions qui en découlent. Vu que les femmes s’organisent en non-mixité pour discuter et prendre les décisions qui les concernent, lorsque l’on applique ce quota au sein des organisations mixtes, il s’agit en fait de personnes porte-parole du mouvement des femmes.

Voici les principales structures du mouvement des Femmes Libres du Bakur dont nous avons connaissance :

• les Académies de Femmes, ces lieux où elles se retrouvent pour apprendre ensemble, dans une démarche proche de l’éducation populaire, en partant des expériences et connaissances de chacune, et où l’alphabétisation et la formation politique sont la base ;

• les coopératives permettent aux femmes d’accéder à un revenu et viser l’indépendance économique ; souvent il s’agit de se mettre ensemble pour produire et vendre l’artisanat qu’elles fabriquaient déjà chez elles sans avoir d’accès à la vente ;

• JINHA, une agence de presse composée exclusivement de femmes a été créée le 8 mars 2012 pour contrecarrer les articles extrêmement misogynes écrits dans la presse officielle ;

• les conseils de rues, de villages et de quartiers ont leurs propres structures en non-mixité. Elles traitent des sujets qui les concernent, mettent en place des commissions pour amener des solutions aux problèmes qu’elles soulèvent, puis ces espaces sont le premier repli pour les femmes victimes de violences ;

• de nombreuses associations de femmes, indépendantes des autorités étatiques, ont vu le jour. Une de leurs activités principales est de venir en soutien aux femmes victimes de violence conjugale. Pour cela, plusieurs refuges dans les principales villes accueillent ces femmes.


Des ressources utiles pour aller plus loin

Sources et bibliographie :

KERGOAT, D. Le rapport social de sexe. De la reproduction des rapports sociaux à leur subversion. 2001

Ministère de l’Education Nationale. Repères et références statistiques, Chapitre 8, Les personnels. 2020. https://www.education.gouv.fr/reperes-et-references-statistiques-2020-1316

Harris Interactive. L’impact du confinement sur les inégalités femmes-hommes. 2020 (enquête commandée par le Secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes) https://harris-interactive.fr/opinion_polls/limpact-du-confinement-sur-les-inegalites-femmes-hommes/

Service Checknews. Combien y a-t-il de viols chaque année ? Combien de plaintes ? Combien de condamnations ? Libération. 2019.

https://www.liberation.fr/checknews/2019/02/08/combien-y-a-t-il-de-viols-chaque-annee-combien-de-plaintes-combien-de-condamnations_1708081

Ifop pour le Défenseur des droits. Enquête sur le harcèlement sexuel au travail. 2014. https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/ddd_etu_20140301_harcelement_sexuel_synthese_ifop_0.pdf

Des textes de lois et autres textes juridiques

La loi n°2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexistes et sexuelles modifie ou complète certaines dispositions pénales existantes (prescription, infractions sexuelles sur mineurs, harcèlement sexistes et sexuel de groupe …), crée de nouvelles infractions (outrage sexiste, captation d’images intimes, administration de substances) et renforce la prise en compte des violences via la formation de divers professionnels, l’extension de compétences ou dans l’élaboration d’outils de planification.

La loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel instaure une nouvelle définition plus large et plus précise du harcèlement sexuel conforme au droit européen et assortie de sanctions plus lourdes. Elle harmonise ainsi les dispositions législatives relatives au harcèlement sexuel applicables au plan civil et au plan pénal. Elle élargit la protection contre les discriminations et renforce l’obligation de prévention qui incombe à l’employeur.

Des outils pour aller plus loin

Le site de l’AVFT (association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail) Notamment sa boîte à outils. https://www.avft.org/

Les conseils sur le site du CFCV (collectif féministe contre le viol) https://cfcv.asso.fr/

Le Guide de Solidaires Agir syndicalement contre violences sexistes et sexuelles au travail en ligne et en pdf ici : https://solidaires.org/Guide-Solidaires-Agir-syndicalement-contre-les-violences-sexistes-et-sexuelles

Le centre Hubertine Auclert pour des ressources pédagogiques https://www.centre-hubertine-auclert.fr/

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Actu Solidaires 78

« Quel effet Covid sur les militant·es, les collectifs de lutte ? » – Débat Solidaires 78

Débat-échanges mardi 4 mai 2021

Retour sur « Quel effet Covid sur les militant.es, les collectifs de lutte ? »

Le rendez-vous hebdomadaire de l’accueil syndical Solidaires 78 à La Librairie La Nouvelle Réserve de Limay, a inauguré le débat mensuel prévu avec ce thème sensible qui a passionné les présent.es (12)

Oui, la brutalité de la situation inédite due à cette pandémie et sa gestion désastreuse par les gouvernants avec la casse sociale, les attaques contre les libertés et les droits, n’a pas épargné les collectifs militants et leurs participant.es. Un coup d’arrêt brutal a été donné en pleine mobilisation contre la réforme des retraites après l’année intense de lutte avec les Gilets Jaunes, où nous avions goûté à des moments collectifs souvent réjouissants, et même envisagé des projets prometteurs !

Notre quotidien, nos habitudes, notre équilibre à la fois personnel et collectif en ont été bousculés, déboussolés, ébranlés, que nous ayions été contaminés ou pas. Fatigue, repli sur soi, mal-être, angoisse et dépression ont aussi atteint nos rangs en plus de la colère, elle, très partagée.

Nous n’en sortons pas tous et toutes indemnes. L’inédit peu réjouissant nous a aussi impacté.es: confinements, restrictions de déplacements et des droits, couvre-feu, charge mentale au travail et à la maison, amplifiée pour certaines professions, notamment féminisées (à l’hôpital, dans les services à la personne, pour les personnels de l’éducation, les caissières ou femmes de ménage…).

Des situations familiales souvent percutées, la crainte de l’avenir pour les jeunes, du chômage- réel- pour d’autres, l’isolement pour certain.es : une avalanche de contraintes déstabilisantes, les collectifs de travail éclatés, n’ont pas épargné les militant.es et leurs organisations. Certes une partie d‘entre nous avons peut-être trop intériorisé la pression générale, piégés par l’infantilisation pesante et culpabilisante du gouvernement.

Ce mardi a été aussi abordé longuement la question des effets et de la place du télé-travail (notre visio-formation du 6 avril par internet avait déjà creusé le sujet).

Malgré les décalages et l’éparpillement, il a fallu donc s’organiser autrement pour continuer, ne pas perdre les liens, comme dans une sorte de clandestinité, faire encore plus preuve de ténacité et d’imagination : réunions internes ou publiques par visio conférences (de Solidaires 78 ou avec d’autres comme l’Assemblée de lutte du Mantois ou l’AG interpro des Mureaux), multiplication des échanges par réseaux sociaux ou mails, actions de désobéissance civile, rencontres fortuites, mais aussi rassemblements publics déclarés avec d’autres forces ou actions possibles notamment dans certains secteurs, et avec d’autres groupes locaux.

Saluons ici la ténacité du groupe féministe des Fffrac du Mantois qui a tenu des rassemblements très animés presque tous les 8 du mois dès septembre pour préparer la grève des femmes du 8 mars 2021!

Pour Solidaires 78, ne pas disparaître de la circulation a été aussi notamment possible localement grâce à l’ouverture de la librairie La Nouvelle Réserve à Limay. Ainsi nous avons pu démarrer dans une salle ou dans la cour, l’accueil syndical hebdomadaire envisagé depuis l’été 2020 (?). Ce temps précieux du mardi fin d’après-midi a permis aussi de lancer et peaufiner notre site d’information sur lequel vous lisez cette lettre hebdomadaire, entre autres.

Oui, parce qu’il faut des lieux et du temps pour que les collectifs militants puissent survivre !

Constatons qu’en plus des atteintes aux droits, le désastre social en cours avec la montée du chômage à bas bruit, la flopée de licenciements notamment dans l’automobile, la surexploitation exacerbée par la crise, n’ont pas encore trouvé de réponses massives à la hauteur.

Même si des luttes défensives n’ont pas cessé (contre la répression et des licenciements), il est temps de préparer la contre-offensive en étant encore plus régulièrement sur le terrain que ce soit dans des secteurs visibles (hôpital, éducation, multinationales…) ou plus invisibles comme les petites boites, les sous-traitants, les précaires… Nous avons des idées, appliquons-les !

L’effet Covid peut aussi rebooster notre détermination combative et imaginative !

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Revue de presse

Accident du travail

Un homme de 22 ans, employé de la société Bertrand pneus a été gravement blessé à Carrières-sur-Seine (Yvelines) le 5 mai 2021 après l’explosion d’un pneu de camion. Il intervenait pour un dépannage, route de Bezons, à Carrières-sur-Seine (Yvelines). Transporté en urgence à l’hôpital, le pronostic vital était engagé.

Aux dernières nouvelles, le salarié s’est réveillé et ses jours ne semblent plus en danger.

Une enquête a été ouverte pour déterminer les causes précises de l’explosion. L’inspection du travail y a été associée. (Source : 78actu.fr)

Au 28 avril 2021, travailleur.euses ont déjà perdu la vie au travail (voir notre article)

Voir aussi la fiche Accidents du travail de Solidaires

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Actu Solidaires 78 Finances publiques

10 mai : en télétravail ou en présentiel, journée de grève DGFiP

Soutien des fédérations des Finances à la journée de grève DGFiP du 10 mai

Les fédérations des finances Solidaires, CGT, FO, CFDT et CFTC soutiennent pleinement la journée de grève nationale des agents des Finances Publiques le lundi 10 mai.

Ce 10 mai l’intersyndicale DGFiP, Solidaires, CGT, FO, CFDT/CFTC appelle l’ensemble des personnels (en télétravail ou en présentiel) à se mettre en grève et manifester leur ras le bol face à leur administration qui continue de restructurer, démembrer, amputer, atomiser missions et structures comme si rien ne s’était produit depuis un an.

Face à la pandémie et à ses conséquences humaines, sociales et économiques, le gouvernement et Bercy ont su pourtant recourir aux qualifications, à l’expérience et à la conscience professionnelles des agents, rappelant l’importance du service public en général et en son sein la place de la DGFiP.
Rien que le bilan de cette situation exceptionnelle, situation qui perdure aujourd’hui, aurait dû inviter les pouvoirs publics et administratifs à revoir leur copie dévastatrice.
Pourtant la DGFiP, non seulement démantèle les services, mais elle détruit plus encore les repères des agents et des usagers, méprisant l’investissement des uns réduits à n’être que des variables d’ajustement budgétaires, ignorant les besoins des autres bien loin d’un service virtuel sans contact humain ajoutant ainsi un peu plus d’angoisse dans cette période.

Plus que jamais, les missions de service public de la DGFiP démontrent leur utilité au service de l’intérêt général. C’est le moment pour réaffirmer les besoins de ce service public.

Le 10 mai est l’occasion pour exiger pour la DGFiP et ses agents :

  • des implantations de proximité qui soient des services de plein exercice assumant leurs missions de service public ;
  • des moyens humains et budgétaires pour exercer leurs missions essentielles au fonctionnement de l’État ;
  • des conditions de travail respectueuses des personnels ;
  • la juste reconnaissance des engagements professionnels des agents en termes de droits, de garanties et de pouvoir d’achat.

Cette journée de grève ne concerne pas que la DGFiP et ses personnels. Elle concerne bel et bien l’intérêt général et le maintien d’une république démocratique et sociale fondée sur l’impôt, outil de redistribution des richesses, et sur le contrôle du bon usage des deniers publics ainsi collectés.
Cette journée raisonne dans tout le ministère, pas une seule direction n’est aujourd’hui épargnée par le jeu de massacre qui consiste à démanteler le contenu des missions, à diluer ces dernières, à les rendre non opérationnelles, en réduisant de façon drastique les effectifs et les moyens.

Dans la situation sanitaire actuelle, Bercy et ses directions sont tout particulièrement au cœur de la bataille, de la relance au financement de l’action publique et contribuent à ce que la société ne s’effondre pas.

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Actu Solidaires 78 Éducation

Annonces sur les examens : le ministre est toujours loin du compte

Après avoir reçu les syndicats ce mercredi 5 mai, Jean-Michel Blanquer a, comme à son habitude, réservé ses annonces aux médias. Le ministre annonce maintenir toutes les épreuves du baccalauréat.
Quelques aménagements à la marge sont annoncés, notamment le remplacement de la note de l’épreuve de philosophie par la moyenne du contrôle continu si la première lui est inférieure. L’épreuve anticipée de français n’est modifiée également qu’à la marge : une augmentation du nombre de sujets. Cette modification peut même s’avérer contre-productive et faire perdre un temps précieux en analyse des sujets.
Le ministre a annoncé contre tout bon sens le maintien de l’épreuve du grand oral : SUD éducation n’a eu de cesse de dénoncer le caractère socialement discriminant de cette épreuve et demander sa suppression. En cette année où les élèves auront encore moins eu le temps de la préparer, le petit aménagement proposé (annoncer les sujets n’ayant pas été traités en cours) ne saurait être suffisant. En lycée professionnel, le ministère persiste à maintenir l’épreuve de chef d’œuvre de CAP. Les lycéen-ne-s réclament l’annulation de cette épreuve et les pétitions à ce sujet comptent de nombreux signataires. On voit ici encore l’entêtement du ministre, prêt à tout pour sauver les apparences et faire croire que le baccalauréat conserve sa valeur de diplôme national. SUD éducation continue à réclamer la suppression de cette épreuve pour cette année et pour celles à venir.
SUD éducation revendique pourtant depuis 12 mois l’aménagement et l’adaptation des programmes à la crise sanitaire. Le ministre Blanquer est resté sourd à cette revendication de bon sens. Il porte la responsabilité de la désorganisation actuelle et de l’angoisse des lycéen-ne-s à l’approche des épreuves. SUD refuse de se laisser enfermer dans un dilemme entre le maintien à tout prix des épreuves terminales (discriminantes au vu de l’année écoulée) et l’effet d’aubaine que représente la crise sanitaire pour les partisans du démantèlement du baccalauréat national.
Les lycéen-ne-s ont de nombreuses raisons d’être en colère et de se mobiliser pour dénoncer l’injustice qui préside aux décisions du ministère. Ils et elles s’étaient déjà mobilisé-e-s en novembre contre la mauvaise gestion de la crise sanitaire par le ministre. SUD éducation les soutient une nouvelle fois dans leurs actions et dénonce la répression policière et administrative dont ils font l’objet.
Face à l’entêtement du ministre, la question de l’annulation ne doit pas être tabou. Il est déjà arrivé que le baccalauréat soit accordé à tout-e-s les candidat-e-s. SUD éducation appelle les personnels à se réunir en assemblées générales et à définir leurs revendications et modalités de soutien aux lycéen-ne-s.
SUD éducation continue de revendiquer l’abrogation des réformes Blanquer du lycée et du baccalauréat.

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Actu Solidaires 78 Poste / Télécom

Sud PTT : en grève le18 mai !

Faisons taire la bande des zéros

Après avoir félicité les « héros » pendant la pandémie, la direction refuse désormais de verser une prime aux postier·e·s et annonce une attaque massive contre tous les métiers.

Zéro augmentation, Zéro prime, zéro embauche, réorgs partout = Riposte !

Les projets de la direction de La Poste sont si violents et nombreux que pas un secteur n’échappe aujourd’hui à la colère. Entre les réorganisations (1000 à la distri !), les suppressions de bureaux, la précarité qui monte, les changements divers et variés dans les missions des postier·e·s et le gel des salaires ou la suppression de l’intéressement, il y a de nombreuses raisons de rentrer dans l’action.
La volonté du groupe d’imposer brutalement ses vues se fait au prix de notre pouvoir d’achat et de nos conditions de travail, il faut une riposte à la hauteur.

Pour la fédération Sud PTT, c’est le 18 mai !

Depuis début avril de nombreuses intersyndicales se réunissent partout sur les territoires et beaucoup appellent d’ores et déjà à une journée d’action et de grève le 18 mai.

A l’heure où ces lignes sont écrites on peut déjà citer les intersyndicales des Bouches-du-Rhône, du Calvados, des Côtes d’Armor, du Finistère, de La Gironde, de l’Ille-et-Vilaine, de l’Eure, de la Seine Maritime, du Morbihan, du Vaucluse, des Hauts-de-Seine et nous en oublions sans doute.

Ces initiatives doivent être soutenues et relayées. Elles doivent se traduire par une perspective nationale. La fédération Sud PTT appelle donc l’ensemble des postier·e·s à se mobiliser, par la grève et les manifestations, le 18 mai. C’est d’ailleurs l’esprit de l’appel intersyndical national du 19 avril qui proposait « la construction de mobilisations avec une journée de convergence des luttes dans la 2ème quinzaine de mai ». Nous espérons que l’intersyndicale nationale portera bientôt cette date et prendra ses responsabilités.

La colère qui monte est inédite de par son ampleur, saisissons l’occasion ! Assez des luttes bureau par bureau, secteur par secteur, c’est un tous ensemble qu’il nous faut !

• Pour les salaires, les primes, le13ème mois !
• Pour des embauches, contre laprécarité
• Contre les réorgs et lesfermetures de bureaux !

Nous sommes toutes et tous concerné·e·s, nous sommes des dizaines de milliers et ils sont une poignée !

LE 18 MAI, TOUTES et TOUS EN GRÈVE ET EN MANIFESTATION !

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antifascisme

Dossier VISA n°9 : Tribune des généraux, le danger fasciste grandit !

La date n’était sans doute pas choisie par hasard. C’était jour pour jour soixante ans après le « putsch d’Alger » du 22 avril 1961, cette tentative d’une partie de l’armée – représentée par quatre généraux –, de renverser le gouvernement gaulliste et de maintenir l’Algérie dans le rapport colonial coûte que coûte, appuyée en cela par un mouvement ancré parmi les colons européens dans le pays. Un putsch qui échoua finalement mais donna naissance à un monstre violent, l’« Organisation de l’armée secrète » (OAS) qui assassina à tour de bras dans une Algérie dans laquelle la guerre coloniale s’achevait, constituant le dernier mouvement armé de masse dans l’histoire française récente. 

En ce 22 avril 2021, une tribune était publiée sur le site Internet du magazine Valeurs actuelles. Les signataires du texte sont militaires, la plupart d’entre eux à la retraite. Au début, ils étaient vingt. Au bout du compte, ils seraient maintenant une trentaine de généraux et – au total – plusieurs milliers de militaires à soutenir la désormais fameuse tribune, puisque les signatures continuèrent à affluer au fil des jours. Une émission de BFM TV annonçait, le dimanche 02 mai, que le nombre de signataires dépassait désormais les « 22.000 », parmi eux cinquante généraux.

illustration

Dossier Visa n° 9

A propos du fond

Sur le fond, voici ce que dit en substance cette tribune parue sous l’intitulé « Pour un retour de l’honneur de nos gouvernants » :

« L’heure est grave, la France est en péril, plusieurs dangers mortels la menacent. (….)

– Délitement qui, à travers un certain antiracisme, s’affiche dans un seul but : créer sur notre sol un mal-être, voire une haine entre les communautés. Aujourd’hui, certains parlent de racialisme, d’indigénisme et de théories décoloniales, mais à travers ces termes c’est la guerre raciale que veulent ces partisans haineux et fanatiques. Ils méprisent notre pays, ses traditions, sa culture, et veulent le voir se dissoudre en lui arrachant son passé et son histoire. Ainsi s’en prennent-ils, par le biais de statues, à d’anciennes gloires militaires et civiles en analysant des propos vieux de plusieurs siècles.

– Délitement qui, avec l’islamisme et les hordes de banlieue, entraîne le détachement de multiples parcelles de la nation pour les transformer en territoires soumis à des dogmes contraires à notre constitution. (…) »

Jusqu’ici, le texte vise avant tout à régler des comptes avec l’antiracisme ou ce que les signataires tiennent pour ses expressions, sur fond de manifestations internationales (dont quelques mobilisations françaises) suite à la mort brutale de George Floyd aux USA, à la fin mai et en juin 2020 ; puis il en vient à l’ennemi intérieur. Ceci en mélangeant allégrement l’islam politique – dont les contours et le rôle ne sont pas définis – et une problématique générale des quartiers populaires laissés partiellement à l’abandon, que le texte réduit à une vision de « hordes » apparemment intrinsèquement menaçantes, en utilisant un terme plaçant les groupes visés délibérément en dehors de la civilisation humaine.

Le texte critique ensuite « la haine » et la division entretenues par le pouvoir publique en utilisant les forces de l’ordre contre les manifestations de Gilets jaunes. Les auteurs insinuent que le discrédit serait jeté sur ces derniers « alors que des individus infiltrés et encagoulés saccagent des commerces et menacent ces mêmes forces de l’ordre. » On peut retenir, en filigrane, que les initiateurs de la tribune cultivent une certaine sympathie pour les Gilets jaunes, en tout cas ceux du début, idéalisé comme étant l’émanation du ” vrai peuple ‘français” protestant contre le gouvernement tout en s’opposant aux organisations syndicales et à la gauche.

Lors du mouvement des gilets jaune en 2018/2019, au fil des manifestations, la réalité du terrain a évolué prenant, par moments, une orientation politique plus sociale couplée de nombreuses fois avec une présence syndicale significative.

A l’automne 2018, au début du mouvement l’extrême droite avait tenté, parfois avec succès, une OPA au sein du mouvement. La présence des militants syndicaux et du mouvement social avait fini par mettre en échec ces velléités de l’extrême droite d’instrumenter le mouvement des gilets jaunes à son profit.

Tout en se plaçant du côté de l’ordre et en dénonçant un Etat pas assez répressif envers les mouvements sociaux et les jeunes des quartiers, les « militaires séditieux dénoncent la répression des gilets jaunes. Sous entendant que, sciemment, le gouvernement aurait épargné « l’ultra gauche ». On est en pleine théorie du complot !

Le texte affirme ensuite sans complexe la nécessité de la répression étatique : « Aussi, ceux qui dirigent notre pays doivent impérativement trouver le courage nécessaire à l’éradication de ces dangers. »

Pour finir ces généraux d’obédience d’ extrême droite concluent par une sorte d’appel à la guerre civile en menaçant d’une intervention de leur « congénères/complices » si, jamais, leurs prédictions paranoïdes se concrétisaient :« Par contre, si rien n’est entrepris, le laxisme continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une explosion et l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national.

On le voit, il n’est plus temps de tergiverser, sinon, demain la guerre civile mettra un terme à ce chaos croissant, et les morts, dont vous porterez la responsabilité, se compteront par milliers. »

C’est sur ces mots, et donc sur l’annonce d’une perspective de milliers de morts, que le texte se termine.

Le problème n’est pas le risque d’un gouvernement militaire qui, dans la période que nous vivons, est complètement irréaliste

De nombreux et nombreuses commentateurs ou commentatrices y ont vu un appel plus ou moins direct à la guerre civile, à l’intervention des troupes dans un conflit intérieur.

D’autres ont tenu à relativiser, à calmer les inquiétudes. Des ministres macronistes n’ont cessé de répéter sur les différentes chaînes de TV que les signataires ne représenteraient qu’« une poignée », un petit nombre sur 200.000 militaires actifs ou à la retraite. Ce qui sonne certes vrai si on se base sur les vingt initiateurs, mais est sans doute nettement moins vrai lorsqu’on prend en compte le nombre total de signataires qui sont venus s’y rallier. Ce nombre serait désormais à cinq chiffres, sachant que le « devoir de réserve » imposé aux militaires pourrait les faire hésiter ; le gouvernement a d’ailleurs, à ce propos, annoncé des sanctions contre quelques-uns au nom (justement) de la violation dudit devoir des réserves. 18 mises à la retraite d’office semblaient ainsi envisagées à la fin avril. La possibilité d’une sanction, courue d’avance, a ainsi pu limiter le nombre de signataires… ce qui fait que l’écho réel des thèses défendues par le texte parmi les militaires professionnels pourrait être bien supérieur à celui que le gouvernement admet.

Certes, il ne faudra sans doute pas s’attendre au scénario d’un régime militaire tel qu’il existait notamment au Chili entre 1973 et 1990 (avec une participation active, toutefois, des économistes ultralibéraux de l’« Ecole de Chicago » qui transformèrent le Chili sous Augusto Pinochet en laboratoire des privatisations) ou encore en Argentine entre 1976 et 1983. Dans un pays hautement industrialisé et/ou à haut degré de productivité, un régime militaire gouvernant essentiellement par la contrainte ne suffirait guère à faire fonctionner l’économie. Un régime autoritaire devra, au minimum, soitêtre en mesure de s’assurer la coopération de certaines forces sociales, soit être en mesure de s’appuyer sur une force politique capable de drainer derrière elle une partie des classes populaires en dévoyant leur mobilisation, p.ex. sur des bases nationalistes. Un régime militaire pur ne serait pas fonctionnel du point de vue même des dominants.

Toujours est-il que le véritable danger ne réside sans doute pas dans un coup d’Etat militaire qui viserait à ériger une dictature sur la base de l’armée mais ailleurs.

Le véritable danger réside dans le fait de légitimer davantage une politique de la violence présentée comme une solution aux multiples crises que traverse la société française ; une politique autoritaire qui prétendrait dépasser ses contradictions par un usage de la force présenté comme légitime, et ceci, en cherchant le consentement d’une partie plus ou moins large de la population en l’opposant à d’autres groupes sociaux. Une force politique, au moins (même si c’est de manière non exclusive), s’offre comme instrument d’une telle politique. Il s’agit de l’extrême droite.

Certains des signataires avaient d’ailleurs déjà eu, dans un passé récent, des accointances avec les forces organisées de ce camp politique. Ainsi l’ex-général Christian Piquemal avait-il été radié des cadres de l’armée en 2016 après avoir participé à une manifestation contre les exilé-e-s à Calais, appelé notamment par la mouvance autour du média fasciste Riposte Laïque. Le général Antoine Martinez prétendait, jusqu’ici, vouloir lui-même se présenter à l’élection présidentielle 2022 avec un programme tourné largement vers le rejet de l’immigration. Enfin, plusieurs des signataires, généraux hors activité, avaient déjà été candidats pour le FN devenu RN, dont Norbert de Caqueray (candidat à Vannes/56), Eric Champoiseau (candidat à Libourne/33), François Gaubert (conseiller régional RN en Occitanie) ou encore Emmanuel de Richoufftz (successivement candidat du FN/RN puis du parti de Nicolas Dupont-Aignan au Grau-du-Roi/30).

L’extrême droite s’en mêle

Ce n’est ainsi pas du tout un hasard si, dès le 23 avril 2021, Marine Le Pen a invité les militaires initiateurs de la tribune à la rejoindre, à travers une « Lettre ouverte » publiée – elle aussi – sur le site de Valeurs actuelles. On y lit : « (…) Les inquiétudes que vous exprimez avec courage ne peuvent rester au stade de l’expression d’une indignation, fût-elle puissante. Elle exige en démocratie, la recherche d’une solution politique. (….) Je vous invite à vous joindre à notre action pour prendre part à la bataille qui s’ouvre, qui est une bataille certes politique et pacifique, mais qui est avant tout la bataille de la France. »

C’est ce soutien affiché par Marine Le Pen, réitéré publiquement aux microphones de France Info le mardi 27 avril, qui aura déclenché les cris d’orfraie de plusieurs responsables de la macronie, jusque-là resté-e-s sans réaction ; l’ex-ministre de l’Intérieur Christophe Castaner p.ex. critiquant ensuite la présidente du RN pour sa « récupération politique ».

Certains des signataires se rebifferont d’ailleurs aussi gentiment en faisant remarquer qu’ils souhaitaient rester maître de leur vote, se voulant sans doute ménager aussi une possibilité de voter par exemple pour un Nicolas Dupont-Aignan qui avait, lui aussi, bruyamment salué la tribune (« Je la trouve excellente, elle est très modérée »). Ou alors, si jamais il se présentait une troisième fois après 1995 et 2007, pour le vicomte Philippe de Villiers ? Ce dernier avait, une semaine avant la publication de la tribune par Valeurs actuelles, orné la Une du même magazine (numéro du 15 au 21 avril 2021) sous ce titre prometteur : « J’appelle à l’insurrection ! »

La logique dans laquelle se placent des responsables de l’extrême droite lorsqu’elles ou ils s’intéressent à la tribune et ses signataires, est très limpide. Marion Maréchal, invitée au microphone d’Appoline de Malherbe sur RMC et BFM TV dans la matinée du jeudi 29 avril, l’a bien résumé par cette phrase qui expliquait que l’expérience en opération extérieure – autrement dit, sur des lieux de conflit « chaud » – pouvait être d’un grand intérêt pour inspirer le maintien de l’ordre, sur le territoire français. Dans l’original : « que leur expérience sur des théâtres d’opération extérieurs, des pays en guerre ou des pays qui ont connu la guerre civile, leur permet d’avoir une grille d’analyse (…) qui est intéressante, justement, pour pouvoir dénicher les signes avant-coureurs qui pourraient éventuellement exister dans notre société, relativement à l’état de guérilla latente que nous vivons au quotidien. »

Ces termes n’expriment rien d’autre que l’idée d’une militarisation explicite et sans limite du maintien d’ordre, notamment dans des zones du territoire français marquées par une concentration importante de problèmes sociaux, souvent accompagnées d’une concentration de populations immigrées stigmatisées et ouvertement dépeintes comme un ennemi irréductible à mater, ou à écraser violemment au besoin.

C’est dans le même esprit que Robert Ménard, le maire d’extrême droite de Béziers, dira le même matin lors d’un débat – deux heures plus tard – sur BFM TV qu’« envoyer l’armée dans les banlieues, je trouverais ça très bien ». 

L’organisation des forces de l’ordre en France, avec la gendarmerie (intervenant en matière de maintien de l’ordre suivant une répartition des rôles avec la police mais dépendant hiérarchiquement du ministère de la Défense) permettrait, d’ailleurs, théoriquement d’assurer une sorte de continuum entre logique militaire et logique policière, si un pouvoir public assumait une approche ouvertement guerrière.

Voilà le véritable intérêt d’une telle approche pour l’extrême droite, dont une participation au pouvoir public – même si elle est loin d’être assurée au moment où ces lignes sont écrites – apparaît tout de même comme un scénario autrement plus probable qu’un gouvernement français issu de l’armée elle-même.

Radicalisation idéologique à droite

Alors que la droite classique est restée majoritairement silencieuse sur l’affaire des militaires, au moins un élu de premier plan de ce camp politique a lui aussi pris fait et cause pour leur tribune ; il s’agit du sénateur LR des Alpes-Maritimes, Henri Leroy, qui s’est ainsi exprimé sur « France Bleu Azur », le mardi 27 avril : « Ils ont raison, notre France s’en va, il faut la sauver », tout en critiquant leur méthode.

D’autres élu-e-s de la même droite iront moins loin, mais dirent eux ou elles aussi « partager le constat » sans cautionner la démarche, à l’instar de Rachida Dati : « Je ne l’aurais peut-être pas écrite comme ça (mais) ce qui est écrit, c’est une réalité », dira-t-elle.

Ceci s’inscrit aussi dans un contexte de nouvelle poussée de durcissement idéologique d’une partie de la droite, après une première vague de radicalisation sous la présidence de Nicolas Sarkozy, avec la création d’un « ministère de l’immigration et de l’identité nationale » (2007), le lancement d’un grand « débat sur l’identité nationale » (novembre 2009 à février 2010) qui fera cependant un flop, etc.etc.

Cette fois-ci, le raidissement idéologique touche aussi des secteurs de la droite réputée « modérée », dès lors que l’on entend par exemple Valérie Pécresse affirmer sur un plateau réunissant CNews, Europe 1 et Les Echos, dimanche 25 avril 21 : « Il faut d’abord cesser de nier le lien entre terrorisme et immigration. Il y a un lien (…), notamment avec l’immigration la plus récente. »

Abondant tout à fait dans le même sens, un éditorial du quotidien Le Figaro – habituellement proche de la droite LR – du lundi 26 avril 2021 postule, parmi d’autres élucubrations, prenant appui sur l’odieux attentat commis le 23 avril à Rambouillet contre une agente administrative dans un commissariat de cette ville des Yvelines : « Que ceux qui se contemplent dans ce qu’ils appellent pompeusement Etat de droit méditent, après ce nouveau drame, devant l’affaissement de l’institution (…). Depuis des décennies, nos cours suprêmes renforcent les droits fondamentaux des étrangers : facilité pour les visas, largesse du droit d’asile, nombre d’expulsions dérisoire, naturalisations complaisantes. (…) Le principe de précaution invoqué en toutes circonstances, de prudence sanitaire extrême en délit d’écocide, disparaît en matière migratoire. » (Article signé Vincent Trémolet de Villers, rédacteur en chef des pages « Débat et Opinions » du journal.)

Trémolet de Villers ira plus loin dans son éditorial, même si ses autres propos pourraient aussi être mis en correspondance avec des sorties de dirigeants du FN. Ainsi, après avoir fantasmé sur une prétendue facilité dans l’accès aux visas ou au statut de réfugié(e) supposons à son profit que l’éditorialiste du Figaro ne sait, sur ces points, réellement pas de quoi il parle il établira une comparaison entre l’immigration de personnes humaines et des virus ou encore des polluants, en évoquant le principe de précaution en en matière de lutte contre la pandémie (qu’il conteste visiblement au passage) ainsi que le droit de l’environnement et la future « Loi Climat ». Gollnisch, lui, avait préféré dans le passé comparer les immigrés aux déchets nucléaires en parlant, lui aussi, de « principe de précaution »…

C’est à propos du même attentat de Rambouillet du 23 avril que l’initiateur principal de la tribune publié par Valeurs Actuelles, Jean-Pierre Fabre-Bernadec, justifiera – entre autres dans plusieurs contributeurs au média en langue française et proche du pouvoir russe, fr.sputniknews – l’approche des signataires de celle-ci. La boucle semble ainsi bouclée.

Une nouvelle preuve de la dangerosité de l’extrême-droite 

Si preuve il était encore besoin de trouver, cette tribune des généraux vient nous l’amener : une fois de plus, la dangerosité de l’extrême droite éclate au grand jour !

En effet, c’est bel bien l’ADN du fascisme qui transpire de ces lignes : un pouvoir autoritaire et d’une violence extrême tournée avant tout contre une partie de la population, stigmatisée.

Ne nous y trompons, quelle que soit la colère, au combien légitime, que nous éprouvons contre Macron et son gouvernement, le RN (parti fasciste le plus à même de prendre la tête du pays) ne doit pas être minimisé. L’arrivée au pouvoir de ce dernier ne représenterait pas un « simple » saut qualitatif dans la répression, le racisme etc. Mais bel et bien l’instauration d’une nouvelle ère, un fascisme du 21ème siècle, avec tous els dangers que cela comporte.

Seules les mobilisations de masse, dans l’unité, contre le gouvernement Macron, couplées à une bataille spécifique contre le RN, toute l’extrême droite et leurs idées, pour faire tomber leur masque et les dénoncer, sont à même de redonner de l’espoir et avancer vers une alternative politique.

En cela, les syndicalistes ont une responsabilité majeure !

Tribune des généraux : ils parlent, nous les combattons

Les vieilles ganaches étoilées auteurs de la tribune publiée dans Valeurs actuelles – hebdomadaire qui avait fait paraître la semaine précédente « L’appel à l’insurrection » de Philippe de Villiers – sont ces mêmes officiers qui, au cours des années 1974 à 1981, ont impitoyablement combattu les droits démocratiques d’expression et d’association aux armées. Ces mêmes officiers qui ont embastillé pour de longs mois des centaines de soldats, appelés du contingent et engagés, qui revendiquaient leurs droits de citoyens et de travailleurs sous l’uniforme. Ces mêmes officiers qui réprimaient ce qu’ils appelaient alors l’«ennemi intérieur» ou l’«anti-France».

Aujourd’hui, leur tribune est un appel à l’épuration ethnique du pays et à consolider l’ordre social par un recours à l’armée. Ce serait une erreur de se contenter de leur opposer l’obligation de réserve qui musèle les citoyens en uniforme. S’aventurer sur ce terrain serait renforcer et légitimer le régime antidémocratique d’exception qui étouffe la voix et la conscience des soldats. Ceux-ci sont aujourd’hui assujettis à la loi du silence ; pour combattre les factieux et les apprentis-putschistes, il faut permettre la libre expression des courants démocratiques au sein de l’armée.

Les questions militaires et le fonctionnement de l’armée constituant un enjeu politique et social à part entière, c’est politiquement que l’on doit combattre ces saillies autoritaires et non faire appel à des mesures disciplinaires.

Le 28 avril 2021

Patrick Le Tréhondat (ancien quartier-maître de réserve), ancien membre d’Information pour les droits du soldat (IDS), du comité de soldats Tonnerre de Brest et du bureau de la Conférence européenne des organisations d’appelés (ECCO).

Christian Mahieux, (ancien objecteur insoumis), ancien membre des Comités de lutte des objecteurs de conscience (CLO) et du mouvement d’objection collective OP20.

Patrick Silberstein (capitaine de réserve), ancien membre d’information pour les droits du soldat (IDS), du comité de soldats de l’École d’application du train et du bureau de la Conférence européenne des organisations d’appelés (ECCO).

Extraits de Faits et méfaits de l’extrême droite dans le 34 – avril 2021

Par VISA 34

Une tribune signée par une vingtaine de généraux, une centaine de hauts gradés et plus d’un millier de militaires a été publiée le 21 avril par le magazine d’extrême droite Valeurs actuelles. Ils y dénoncent le soi-disant « délitement » de la France et appellent les responsables politiques « à défendre la Nation contre l’islamisme et les hordes de banlieue » car « une guerre civile serait inéluctable ». Cette tribune n’en finit pas de faire des remous. Après avoir déjà fustigé une « tribune irresponsable », la ministre des armées, Florence Parly, a demandé des sanctions. C’est ainsi que 18 soldats d’active identifiés, dont quatre officiers, devront passer par un tribunal militaire.

Cette tribune a été mise en ligne par un site « Place d’armes » dirigé par le capitaine Jean-Pierre Fabre-Bernadac, ancien de la gendarmerie mobile et de l’armée de Terre, mais aussi responsable du DPS, le service d’ordre du Front national. Ce site encense les invités de Robert Ménard comme Bernard Lugan et Alain de Benoist issus de la fachosphère. En réalité, cet ancien officier de gendarmerie est un habitué des prédictions de guerre civile. Le 19 avril, il déclarait chez André Bercoff sur Sud Radio (autre invité du maire de Béziers) « Je crains fort qu’aujourd’hui la situation soit tellement grave, que nous allions vers une explosion et peut-être vers quelque chose de plus grave. Je ne dirai pas le mot guerre civile mais ce n’est pas loin ». Dans un article sur le site royaliste Politique magazine, il expliquait plus clairement sa vision raciste : « Dans une situation explosive, il faut deux protagonistes pour s’affronter. Actuellement nous en avons trois : la population autochtone encore enracinée venant généralement des peuples d’en bas, la masse migratoire communautarisée et souvent islamisée et les « élites » mondialisées et « boboïsées » issus des classes supérieures. La confrontation de ces diverses strates de populations et la lente maturation de ce face à face conduit inexorablement à la guerre civile ou au minimum à une intervention de la force armée. ».

Parmi les signataires, on trouve le général Christian Piquemal, ancien patron de la Légion étrangère, déjà radié en 2016 des cadres de l’armée pour avoir participé à une manifestation interdite contre les migrants à Calais. Juste avant d’être interpellé, Christian Piquemal avait, sur le site de Robert Ménard Boulevard Voltaire, justifié sa décision de braver la décision préfectorale au nom de « la France éternelle » et avait prédit « La France debout va se lever, il va se passer des choses dans les mois qui viennent. » Déjà à l’époque ce général avait reçu le soutien de Marine Le Pen, de Marion Maréchal et bien sûr de Robert Ménard. Ce dernier avait déclaré « Clandestins en liberté, général français arrêté, bienvenue en Hollandie » et encore « Piquemal en comparution immédiate ! La justice plus rapide avec un général patriote qu’avec les voyous du quotidien. ». Faut préciser que ce général est un grand adepte de la théorie du complot dite du Grand remplacement de Renaud Camus. Ce n’est donc pas un hasard si ce discours séditieux est soutenu par toute la fachosphère. Pour Marine Le Pen, ces militaires avaient « interpeller en quelque sorte le peuple français sur la gravité de la situation » et elle les avait appelés à rejoindre son mouvement. Allant exactement dans le même sens que le RN, Robert Ménard a fait semblant de nous interroger « Faut-il s’inquiéter de la tribune des généraux ou de la situation de la patrie ? ».

Parmi les autres signataires de cette tribune, on trouve :

– Le général Antoine Martinez qui dénonce « l’immigration extra-européenne de peuplement » et « l’islamisation » de La France. En 2019, il a aussi agité le spectre d’une « cinquième colonne » jihadiste au sein de l’armée, avec ses « soldats français musulmans qui effectuent chaque année le pèlerinage à La Mecque. »  Ce général est également leader des Volontaires pour la France (VPF), un groupuscule d’anciens militaires persuadés que la France s’effondre sous les coups de boutoir de « l’islam [et de] l’oligarchie financière apatride ».

– Le général de division François Gaubert, conseiller régional RN en Occitanie en 2015 sur la liste de Louis Aliot (candidat sur le 5° canton de Montpellier).

– Le général Norbert de Cacqueray, candidat RN avec sa femme aux municipales à Vannes (Morbihan).

– Le général de division, Eric Champoiseau, figure lepéniste en Gironde et candidat sur la liste aux élections municipales de 2014 et 2020 à Libourne

– Le général de division Emmanuel de Richoufftz, qui aux municipales 2020 au Grau-du-Roi était sur la liste de Debout la France, parti de Nicolas Dupont-Aignan, après avoir échoué à constituer une liste RN.

Citons encore quatre autres généraux, très politisés.

– Daniel Grosmaire, André Coustou et Roland Dubois, ils avaient en 2018 dénoncé avec d’autres généraux le traité de Marrakech sur les migrations, et

– Jean Claude Grollier qui lui avait signer un manifeste des officiers généraux ayant servi en Algérie afin de défendre la mémoire de leur combat.

Alors, évidemment la date du 21 avril n’a pas été choisi au hasard : elle correspond à la date anniversaire de la tentative de putsch des généraux pendant la guerre d’Algérie. Le maire de Béziers d’ailleurs honore la mémoire du commandant Hélie Denoix de St Marc qui, en ce 21 avril 1961, avait décidé de rejoindre les putschistes et plaçant ses hommes dans les rues d’Alger.

Le Rassemblement national dans les casernes

À l’heure de la publication de la Tribune de généraux qui marque une incursion publique des courants d’extrême droite présents dans l’armée, il faut rappeler que la Fondation Jean Jaurès une enquête conduite par Jérôme Fourquet et Sylvain Manternach sur le vote des militaires en faveur du Rassemblement national. Le constat est accablant.

Pour étudier le vote des militaires, l’étude a porté sur le vote dans de nombreuses communes où sont implantés des sites militaires et plus particulièrement sur les bureaux de vote à proximité de logements ou casernements (gendarmerie). Nous ne reprenons pas ici tous les chiffres et les cas étudiés mais nous en citerons quelques-uns significatifs

Ainsi concernant l’armée de terre, dans les villes de Mourmelon-le-Grand et Mourmelon-le-Petit (501e  régiment de chars de combat) alors que le vote RN dans le département s’établit à 30,2% le vote RN bondit à 44,9 % et 41,30 soit +14,70% et 11,11%. À Mailly-le-Camp, ville de caserne, le différentiel atteint 17%. À Suippes (40e  régiment d’artillerie)  le différentiel par rapport à la moyenne départementale est de +15,30%. Dans le sud de la France, à La Cavalerie dans l’Aveyron qui connaît une forte concentration de troupes de la Légion étrangère on trouve un vote RN de +14,60% par rapport au reste du département. L’étude indique que le vote RN (ou FN) a connu une forte progression entre l’élection présidentielle de 2012 et les Européennes de 2014 puis s’est accru aux élections régionales de décembre 2015. Les forts niveaux de vote RN atteints sont donc le produit d’une radicalisation sur ces dernières années. Si les deux auteurs remarquent qu’à la présidentielle de 2017 ce vote a pu refluer légèrement, ils constatent qu’aux Européennes de 2019 « il demeure très élevé ». Ils ajoutent que l’effondrement du vote en faveur des Républicains a profité au RN, ce qui s’appelle tout simplement un transfert de voix, même si la République en marche a pu bénéficier pour une faible partie du recul des Républicains. Détail important, concernant les votes « militaires » qui s’étaient portés sur Fillon lors de la présidentielle  les auteurs concluent que cet « électorat filloniste s’est puissamment reporté sur Marine Le Pen » au second tour.

Dans l’armée de l’air et la Marine

L’étude s’est également intéressée au vote des « aviateurs ». Là aussi, les votes dans des communes à faible population comptant des bases aériennes ont été analysés. Ainsi le dépouillement des votes dans la commune de Ventiseri,  en Haute-Corse, (base aérienne 126, 950 personnels) indique qu’aux dernières européennes, la liste RN atteint 43,6% des voix alors qu’en Haute Corse le RN recueille en moyenne 26,5 % des voix. L’étude cite le constat de Jean-Guy Talamoni, leader indépendantiste, qui déclarait sur France Inter le 28 décembre 2015 : « L’extrême droite est une idéologie importée en Corse. […] Ce sont les bureaux de vote à proximité par exemple de la base de Solenzara, où il y a beaucoup de militaires continentaux […] où le FN fait des scores remarquables.» La note nous emmène ensuite dans le Loiret dans la commune de Bricy, dans le Loiret qui abrite la base aérienne 12. Jordan Bardella y obtient 38,1 % des voix aux européennes contre une moyenne départementale de 25,3 %. Le RN y progresse même lors de la dernière élection présidentielle, puisque Marine Le Pen recueille  39,2 % des voix. La dynamique électorale est bien là.

Les auteurs se sont également intéressés aux bases militaires françaises à l’étranger. Alors que « les Français de l’étranger » votent à 6,40 % pour le RN, à Djibouti, qui compte de nombreuses bases militaires, son score bondit à 27,2 %. Concernant la Marine, l’étude se penche sur la commune de Lanvéoc dans le Finistère avec sa  base aéronavale. Marine Le Pen au second tour de la présidentielle de 2017 obtient 35,6 % contre une moyenne départementale de 22,7 %.

Gendarmes et gardes républicains : un vote très brun

Concernant ces populations militaires, l’étude s’est penchée sur des villes connaissant de fortes concentrations de gendarmes et gardes républicains. À Hyères, dans le bureau de vote où est située une caserne de gendarmerie, l’écart du vote en faveur de Marine Le Pen par rapport à sa moyenne dans la ville elle-même est de +20,3%. À Toulouse, +17,40%, à Maisons-Alfort, +10,8%, au total 14 villes sont ainsi citées avec des chiffres tout aussi éloquents. Les auteurs de l’étude remarquent que « cette très forte prime accordée à Marine Le Pen lors de l’élection présidentielle de 2012 était d’autant plus spectaculaire qu’elle ne s’accompagnait pas d’une minoration du vote en faveur de Nicolas Sarkozy. » Signe là encore d’une radicalisation à droite. Concernant les gardes républicains, le diagnostic est tout autant sévère : « Ainsi, le bureau n° 46, situé boulevard Kellermann dans le 13e arrondissement et où votent les gardes républicains, et leurs familles, du régiment cantonné caserne Kellermann est celui où, à la présidentielle de 2012, Marine Le Pen avait obtenu son score le plus élevé de toute la capitale (18,3%) »  Nanterre qui loge une caserne de la garde républicaine voit son bureau 14 qui est à proximité de la caserne un score de 37,5 % des voix en 2012 pour Marine Le Pen soit 26,8 points au-dessus de son score dans la vile elle-même. L’étude multiplie d’autres exemples.

À l’évidence le vote Rassemblement  national est supérieur dans les casernes que dans le reste de la société. L’absence de tous droits démocratiques d’expression et d’association, y compris syndical, favorise les tendances les plus régressives. Le peu d’attention portée à la situation des personnels aux armées, notamment aux engagés et aux personnels subalternes, par le mouvement syndical renforce l’isolement social et politique de ces populations et les jette le plus souvent dans les bras des fractions les plus réactionnaires ou en tout cas ne permet pas l’expression de courants démocratiques qui pourraient exister en son sein. Rappelons qu’aux Pays-Bas, 80 % du personnel militaire est syndiqué. Qu’au Danemark, le syndicat des soldats et caporaux de l’armée (HKFF) est affilié à la centrale ouvrière à la confédération ouvrière Fagbevægelsens Hovedorganisation (FH).

Le 2 mai 2021

Patrick Le Tréhondat (ancien membre du comité de soldats Tonnerre de Brest)

L’ensemble de l’étude est disponible sur le site de la Fondation Jean Jaurès

https://jean-jaures.org/nos-productions/pour-qui-votent-les-casernes
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Actu Solidaires 78

1er mai, succès populaire, soutien à la CGT


Après un 1er mai 2020 où les rares manifestant·e·s ayant mis leur nez dehors avaient été verbalisé·e·s sous couvert de pandémie, celui de cette année s’annonçait festif et populaire.

En effet, plusieurs centaines de milliers de manifestant·e·s  sont venu·e·s célébrer la journée internationale des luttes des travailleuses et travailleurs à travers des centaines de rassemblements partout en France.

Si le plaisir de se retrouver toutes et tous était bien présent pour revendiquer fermement contre les politiques liberticides et anti-sociales du gouvernement, l’ambiance festive animée par de multiples fanfares n’a malheureusement pas duré longtemps.

L’Union Syndicale Solidaires 78 condamne fermement les interventions policières récurrentes contre les manifestant·e·s et les cortèges syndicaux parisiens, elle dénonce cette présence militaire quasi permanente, anxiogène et menaçante par des armes mutilantes et létales (grenades et LBD).

La mise en place du SNMO (Schéma National du Maintien de l’Ordre) fait donc les preuves de sa brutalité et de son efficacité à exciter les foules. De plus, Mme SCHIAPPA joue la provocation en dénigrant la fréquentation aux manifestations, c’est oublier un peu vite les violences policières qui ont rebuté plus d’un.e militant.e. Violences dont son gouvernement s’est fait une spécialité. Mais puisqu’elle a du temps à perdre sur les plateaux télé, elle aurait pû donner des nouvelles de ses amis BENALLA et CRASE, coupables mais toujours en liberté, d’agressions sur manifestant·e·s au moyen d’usurpation de l’identité policière.


Nous condamnons également les violentes agressions interne au cortège, Place de la Nation et apportons notre soutien aux blessé·e·s. La violence contre et entre manifestant.es est intolérable. C’est uni·e·s et toutes et tous ensemble (collectifs, gilets jaunes, syndiqué·e·s où non, associatifs …), en faisant grève et en paralysant l’appareil de production que nous vaincrons le pouvoir aux ordres des capitalistes.Nous luttons contre la violence antisociale du gouvernement.


Nous continuons de revendiquer :

  • L’abrogation de la contre-réforme de l’assurance chômage et de la loi de séparatisme
  • Le renforcement massif des services publics, dont la santé et l’éducation-Des brevets publics sur les vaccins et socialisation de l’industrie pharmaceutique-L’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des profits et l’arrêt des contrats précaires pour le retour aux CDI
  • Des conditions sociales et écologiques des aides publiques aux entreprises-Le SMIC à 1700€ net, +400€ par mois pour tou·te·s  dont les retraites et les minimas sociaux
  • L’accès à tous les minimas sociaux pour les 18-25 ans
  • Contre le chômage, pour le partage du temps de travail avec 32h hebdomadaires sans perte de salaire ni flexibilité.
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Actu Solidaires 78 Dans les Yvelines, une classe en lutte...

1er mai : à Mantes et à Paris, c’est dans la rue que ça se passe !

Une première à Mantes !

Samedi 1er mai, une quarantaine de personnes se sont retrouvées – à l’appel de l’Assemblée de lutte du Mantois, des membres des assocs/ collectifs et syndicats en soutien y étaient présents- devant la Collégiale à chanter et à danser sur la super bande son sortant de la sono. Avec en prime grosse caisse et caisse clair…

La police municipale a jeté un œil et seulement demandé qui on était !

Le rassemblement s’est ensuite transformé en petite manif dans les rues de Mantes, déambulation dans le marché avec diff du tract, arrêt devant le local de LR où Pierre Bédier présentait sa liste pour les élections, protégé par ses sbires, encore des chants et de chouettes prises de parole.

Puis un nouveau petit tour dans le marché couvert… et retour à la Collégiale.

En tout cas, ça fait du bien de se retrouver et d’inaugurer une action pour le 1er mai…

et puis ensuite, départ à la manif parisienne, où les militant.es de Solidaires 78 se sont retrouvé·es

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