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Dans le privé et le public, un syndicalisme de lutte pour la transformation sociale

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Idées, débats, cultures Lecture

La Commune de Paris, mémoires, horizons. (Revue Les Utopiques)

1871-2021, la Commune a 150 ans. Un siècle et demi ! Deux écueils possibles : la commémoration acritique, à grand renfort d’images sacrées, de récits hagiographiques (souvent préconçus) ; l’ignorance d’un pan d’histoire ouvrière inconnue car vieille, combattue par l’ordre, mal ou non enseignée, masculinisée … Dans les deux cas, ce serait ne pas servir nos réflexions et actions d’aujourd’hui, et de demain, pour l’émancipation sociale.

Roger Martelli, co-président des Amis et amies de la Commune de Paris (1871) nous invite à croiser les regards sur ces 72 jours, leurs significations, conséquences et enseignements. Finalement, « tout dépendra d’abord de ce que ses héritiers et héritières voudront faire de l’événement Commune de Paris » ! Dans une conversation à quatre voix, Ludivine Bantigny, Maryse Dumas, Christian Mahieux et Pierre Zarka explorent ce qui, depuis 1871 tisse ce fil rouge : Communs, Commune, se fédérer, autogestion, révolution.

Que fut l’œuvre de la Commune ? Gérard Coste retrace l’importance des services publics. Anouk Colombani réhabilite les femmes au travail, puis laboure les étranges résonances entre les débats sur le travail des ouvriers-boulangers et nos débats contemporains sur la démocratie du travail. Jean-François Dupeyron met en lumière les apports des communard·es dans le domaine de l’éducation. Georges Ribeill nous raconte le chemin de fer et les cheminots de 1871. Christian Mahieux exhume le caractère novateur des décisions prises en matière de laïcité.

Assiégée par l’armée prussienne, affamée et attaquée par la bourgeoisie versaillaise, la Commune n’a pas bénéficié d’un contexte favorable aux expériences sociales. C’est peu de le dire ! Cela ne l’empêcha pas de prendre des mesures qu’aucune institution républicaine n’a renouvelé depuis 150 ans ; ainsi des décrets permettant la réquisition d’entreprises que présente Christian Mahieux. Il nous rappelle aussi que la Commune n’échappe pas à son temps : la lutte contre le colonialisme ne fait pas partie des préoccupations. Entre membres de la Commune, débats et divergences ont existé : quels enjeux autour de la définition d’une minorité et d’une majorité ?

Patrick Le Tréhondat nous explique la démocratie en armes, autre innovation communarde que la bourgeoisie s’empressa de faire disparaitre pour laisser la place à « la grande muette ». La Commune, comme tous les mouvements collectifs, ce sont des femmes et des hommes qui s’associent librement, pour lutter, revendiquer, rêver, construire … « Parmi les insurgé·es, se trouvaient des femmes qui sont invisibilisées. » Avec Eliabeth Claude, sortons-les de l’ombre et faisons connaissance ! Christian Mahieux nous propose de découvrir un homme et une femme de la Commune : Eugène Varlin et Léodile Bera, dite André Léo.

Malgré les circonstances tragiques, les arts furent si au cœur des préoccupations révolutionnaires. N’est-ce pas somme toute logique, que ce soit au travers d’eux aussi que se joue une guerre d’interprétation de la Commune mais aussi les possibilités de sa perpétuation ? Un CD accompagne ce numéro. Il mêle des voix militantes d’aujourd’hui, pour la Commune. En italien, en français, en occitan, a capella ou instrumental, enregistré à distance ou ensemble, pris en manif, chanteurs des soirées militantes ou chanteuses professionnelles, chanter la Commune c’est aussi continuer à la faire. A partir des chansons de la Commune, Mymytchell entend « questionner le lien inestimable entre l’expérience politique et le fait de chanter – avec la seule idée de participer à le faire perdurer dans notre esprit et le ranimer dans nos pratiques ! » Tandis qu’Anouk Colombani nous livre une interview d’une communarde contemporaine, Dominique Grange. Gérard Gourguechon montre le lien qui unit les écrivains contre la Commune aux éditorialistes contre nos grèves : la haine et le mépris de classe. Barbara Issaly montre la place de la Commune dans la Bande dessinée.

On prête parfois à la Commune des décisions, des actes, voire mêmes des intentions qu’elle n’a pas eu. C’est l’objet d’une des rubriques du blog de Michèle Audin, qui nous confie ici que, non, la Commune n’a pas brulé la guillotine. La Commune : de Paris ? Oui, mais pas seulement. Bernard Régaudiat analyse celles de Marseille en 1870 et 1874, Matthieu Rabbe raconte Lyon, les camarades de la revue Solidaritat nous décrivent Nîmes, et Christian Mahieux évoque Saint-Etienne, Narbonne, Toulouse, Grenoble, Le Creusot, et Limoges ; et aussi Montereau ou Brest.

L’internationale sera le genre humain… Les militant·es de la Fundación Salvador Segui explique le retentissement de la Commune en Espagne. Nara Cladera nous fait découvrir les communards en Uruguay. Cybèle David nous parle de l’autonomie zapatiste et Richard Neuville de la Commune d’Oxaca, au Mexique.

Quelques repères sont nécessaires, pour mieux appréhender tout ceci. C’est ce que nous proposent Philippe Barrre et Alice Rodrigues, avec deux chronologies : de 1789 à 1871, en passant par 1792, 1830 et 1848 ; de la Commune proprement dite. Renvois vers le dictionnaire biographique Maitron et plusieurs sites internet consacrés à la Commune, ainsi qu’un court lexique complètent cet ouvrage. Enfin, Charles Jacquier revient sur les 100 ans d’une autre Commune, celle de Cronstadt.

Les dessins originaux de Tardi et d’Hélène Maurel, ainsi que deux textes de Jacques Prévert participent de la réussite de ce numéro. Une fois de plus, Serge D’Ignazio nous a généreusement offert plusieurs de ses photos. Merci aussi à Jihel.

Disponible dans toutes les bonnes librairies ou en ligne sur le site des Utopiques

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