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Dans le privé et le public, un syndicalisme de lutte pour la transformation sociale

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Des actions ou des augmentations de salaire ?

En lançant un nouveau plan d’actionnariat, la direction espère faire adhérer les salariés à ses objectifs financiers. Mais quelques actions Renault bloquées 5 ans ne remplissent pas le frigo, quand quelques centaines de « cadres clés » et dirigeants touchent des dizaines de milliers d’actions.

Télécharger le tract du 5 septembre 2023

La direction lance un nouveau plan d’actionnariat salarié : 8 actions gratuites par salarié et un tarif préférentiel sur 11 autres actions. Ces actions sont bloquées 5 ans et leur valeur va dépendre des yoyos de la Bourse. En pleine période d’inflation, ce sont pourtant des augmentations de salaire qui sont urgentes et nécessaires.

13 octobre : journée d’action pour les salaires
L’intersyndicale nationale, regroupant les confédérations et unions syndicales CFDT, CGT, CFE-CGC, FO, UNSA, CFTC, SUD/Solidaires et FSU appelle à une journée de mobilisation vendredi 13 octobre pour l’augmentation des salaires, des pensions et l’égalité femme-homme. SUD appelle à faire grève et à participer aux manifestations qui seront organisées.

Aux USA, les salariés de l’automobile montrent l’exemple. Le syndicat UAW (United Auto Workers) a lancé une grève dans plusieurs usines GM, Ford et Stellantis (34 milliards d’euros de bénéfices en 2022 à eux trois). L’UAW réclame 36% d’augmentation de salaire sur 4,5 ans (18% la 1ère année), la suppression du statut dérogatoire des nouveaux embauchés et des intérimaires (payés moins et n’ayant pas la même retraite ni la même couverture médicale) et la remise en place d’un système de rattrapage de l’inflation. En France aussi, les salaires doivent suivre au moins l’inflation.

Son amie, c’est la finance

Luca De Meo voudrait que les salariés détiennent 10% du capital de Renault. Quitte à susciter artificiellement l’engouement des salariés et à multiplier les distributions d’actions : « Share the future » 2018, « Renaulution shareplan » 2022 et 2023… Ces plans sont financés par l’achat par Renault de ses propres actions. Cet argent n’est pas mis pour soutenir les salaires et l’investissement productif. Au contraire, il alimente un système financier déjà en surchauffe. La crise des subprimes, symbolisée par la faillite de la banque Lehmann Brothers en 2008, n’est pourtant pas si loin. Et si on arrêtait plutôt de mettre le sort de dizaines de milliers d’emplois entre les griffes de la spéculation boursière !

En rachetant ses actions et en les distribuant aux salariés, l’objectif de la direction est double : soutenir le cours de l’action Renault d’une part, et d’autre part faire que les salariés se prennent au jeu boursier et adhèrent aux objectifs pro-finance de la direction.

La Bourse ou la vie
Lors de la privatisation de Renault en 1994, l’action Renault valait 165 francs, soit 25,15 €. Depuis elle n’a cessé de faire du yoyo. En 2007, elle a atteint son record à 119 € avant de chuter à 11,5 € en 2009 suite à la crise des sub-primes. Elle est ensuite remontée à 98 € début 2018… avant l’arrestation de Ghosn qui l’a fait descendre à 17 € en 2020. A la Bourse, le jackpot est pour les gros spéculateurs, les petits porteurs touchent des miettes ou paient la note.

La direction a pour priorité de « gagner la confiance des investisseurs ». Elle s’est félicitée d’être sur le podium 2023 du média financier américain « Institutional investor’s ». Elle préfère ce classement à celui de la banque suisse UBS qui recommande aux spéculateurs de vendre leurs actions Renault. Qui croire ? Les experts financiers ne font que commenter les crises et ne les prévoient jamais.

Salariés actionnaires : une grande famille ?

En fait, le groupe des « salariés actionnaires » cache de profondes inégalités. Il n’y a qu’à comparer les 6 actions gratuites versées aux salariés en 2022 au nombre d’actions versées aux cadres dirigeants.

Prénom et nom (Sources AMF et Renault)FonctionActions gratuites en 2022Montant (valeur action 38.42€ au 19/09/2023)
Luca De MeoDirecteur Général Groupe75 0002 881 500 €
François RogerDRH Groupe25 331973 217 €
Frédéric VincentDirecteur Informatique et Rlt Digital25 331973 217 €
Laurens Van Den AckerDirecteur Design25 331973 217 €
Véronique Sarlat-DepotteSecrétaire générale Alliance25 331973 217 €
Denis Le VotDirecteur DACIA et Supply Chain23 617907 365 €
J-V De Los MozosEx-directeur Industriel et pays Iberia23 104887 656 €
Clotilde DelbosDirectrice Mobilize17 136658 365 €
Gilles Le BorgneDirecteur Ingénierie Renault16 638639 232 €
Thierry PiétonDirecteur financier Renault Group15 173582 947 €
François ProvostDirecteur Achats Renault et Alliance10 815415 512 €
Fabrice CamboliveDirecteur marque Renault9 151351 581 €
Joao LeandroDirecteur Financier Mobilize4 575175 772 €
Catherine GrosDirectrice Art Patrimoine Mécénat3 328127 862 €
Laurent RossiDirecteur Marque Alpine3 328127 862 €
Thierry Charvet Directeur Industriel et Qualité2 49695 896 €
Mr et Mme ToutlemondeSalarié Renault6231 €

Les « cadres clés » et les autres…

Renault lance aussi des opérations de « co-investissement  » destinées aux « cadres clés du Groupe  ». Elles ont « pour vocation d’intéresser les cadres dirigeants du Groupe aux résultats de l’entreprise tout en permettant l’alignement de leurs intérêts long-terme avec ceux des actionnaires. » Des actions gratuites leur sont versées selon des critères financiers (rendement pour les actionnaires, rentabilité des capitaux investis, MOP).

Le Conseil d’administration du 15 février 2023 a ainsi attribué 199 660 actions de performance aux 280 « cadres clés » participants au plan de co-investissement et 8 629 actions à De Meo.

Premiers effets d’un démantèlement

Les 9000 salariés de Horse sont exclus du plan d’actionnariat salarié 2023. Renault a d’ailleurs « déconsolidé » les actifs de Horse en les lui cédant pour 3,6 milliards d’euros. En sera-t-il de même avec Ampere ? Si la direction croit tant à l’avenir du groupe Renault au point de distribuer des actions aux salariés, pourquoi s’échine-t-elle à démanteler le groupe et son patrimoine ?

Les perdants du plan d’actionnariat 2018
Les salariés qui ont souscrit à l’opération « Share the future 2018 » en sont de leur poche. Avec un abondement de 20%, ils ont acheté l’action Renault 58,32 €. Aujourd’hui, elle vaut 38 €. Est-ce pour cette raison qu’elle les verse maintenant en partie gratuitement ?!

L’illusion actionnariale

Au 31 décembre 2022, le capital de Renault se répartissait ainsi :

  • État français : 15.01 %
  • Nissan Finance : 15.00 %
  • Salariés/anciens salariés : 3.79 % (FCPE 2.92 %, individuel 0.87 %)
  • Auto-détention : 1.80 %
  • Investisseurs institutionnels (banques, fonds d’investissement…) : 48.99 % (dont 5.05 % pour The Capital Group Companies, l’un des trois principaux fonds de pension mondial)
  • Public (actionnaires individuels…) : 15.41 %

Même si la part des salariés passait à 10%, ils seraient minoritaires et n’auraient pas de pouvoir de blocage ni de décision. Salariés et actionnaires ont des intérêts différents et souvent opposés.

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