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Féminicides des séniores : l’horreur continue

Publié le 4 mars 2025 par UNIRS – Union nationale interprofessionnelle des retraité-es solidaires

Pour le 8 mars, tract Unirs sur les féminicides et tract des 9 organisations de retraité·e·s

Féminicides des séniores : l’horreur continue

Sur 136 féminicides en 2023, 16 victimes avaient plus de 60 ans. En 2024, c’est encore pire : sur plus de 130 féminicides, 32 victimes avaient plus de 60 ans, soit près de 25% (et 14, plus de 75 ans, invisibles dans les statistiques, qui s’arrêtent à cet âge). Laissée agonisante, abattue par une arme à feu (le plus fréquent), étranglée, asphyxiée, battue à mort, poignardée, électrocutée, égorgée, brûlée dans l’incendie volontaire de l’appartement conjugal … Voilà pour les modalités. En 15 ans, de 2008 à 2023, 340 femmes de plus de 70 ans ont été tuées par leur compagnon de vie.

QUI EN PARLE ?

Si les études, rapports, statistiques et autres communications gouvernementales sur la question des violences sexistes se multiplient, les uns et les autres ne semblent pas avoir grand effet sur les partenaires de couples violents. Le nombre de féminicides ne diminue pas, quel que soit l’âge des coupables ou des victimes.

La férocité des actes commis par d’autres n’a pas d’effet sur les hommes âgés violents et ne les fait pas renoncer à leur crime. Pas de procès retentissant, d’investigation spectaculaire, d’émissions choc sur les principales chaînes d’information aux heures de grande écoute … C’est sûrement que ce n’est pas si grave !

LA HONTE, ICI, N’A TOUJOURS PAS CHANGÉ DE CAMP !

Les féminicides qui concernent les femmes âgées n’intéressent guère les médias, et ne suscitent donc pas de débats d’opinion. Pourtant, à l’heure où un débat sur la fin de vie doit avoir lieu, il serait pertinent d’évoquer le problème de ces maris, « épuisés » par l’aide qu’ils doivent apporter à leur épouse dépendante (alors qu’ils avaient l’habitude d’être servis par elle depuis toujours), qui les achèvent, littéralement.

En 2022, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, plus de 50% des femmes de 70 ans victimes de féminicides ont été tuées en fonction de leur maladie, de leur vieillesse, ou de celle de leur auteur.

Où est l’empathie qui devrait présider aux relations d’un couple lorsque la femme est malade ou dépendante ? Dans le cas inverse, on n’entend guère que des femmes, rompues de fatigue par des soins incessants à leur conjoint, s’en débarrassent en les laissant agoniser ou en les abattant.

Contrairement aux plus jeunes femmes, plus fréquemment sensibilisées dès leur plus jeune âge aux questions du sexisme, les femmes de plus de 70 ans aujourd’hui ont été conditionnées : obéissance au mari, omerta, soumission. Toute une ambiance qui incite à ne pas se plaindre, ni avoir recours à la justice, car ce sera sur elle que reposera la honte, pour les coups reçus – pas sur le conjoint qui les inflige. De plus, la justice est très lente, et l’âge des victimes et des coupables comporte le risque de voir les affaires classées sans suite. Le meurtre est alors assimilé à une euthanasie ou à un suicide altruiste.

Féminicides et violences sexuelles sont fondamentalement une question de santé publique. Pourtant, aucune campagne de prévention sérieuse n’est mise en place pour mettre en garde de potentiels conjoints violents, informer les potentielles victimes sur leurs droits, et l’accueil dont elles devraient pouvoir bénéficier dans les services hospitaliers ou judiciaires.

Pourtant, on a su faire, il y a de nombreuses années, des campagnes contre l’alcoolisme ou la tabagie – mais là, beaucoup d’hommes risquent d’être les victimes de ces addictions, cela explique peut-être que les violences sexuelles, dont les femmes sont majoritairement les cibles, intéressent moins les responsables politiques.

Qui plus est, en 2024, le budget de la mission « égalité hommes-femmes » a été amputé de 10% – on n’ose imaginer ce qui en adviendra au budget 2025, avec les économies programmées dans la fonction publique. En outre, les engagements pris en 2019, à la suite du Grenelle des violences sexuelles, sur la création de 100 centres de psychotroma pour prendre en charge les femmes en danger, avant le dépôt de plainte, n’ont pas été tenus : début 2024, seuls 15 centres ont été ouverts. La grande cause du Président Macron – comme tout le reste, d’ailleurs – a fait pschitt !

Pourtant, les féminicides qui touchent les femmes âgées ne sont pas différents, sur le fonds, des autres féminicides : il s’agit du droit de tuer qu’estime avoir le conjoint sur son épouse. Contrairement à la manière dont sont parfois présentés ces crimes, il ne s’agit pas d’un drame de la vieillesse – qui en l’occurrence consiste à devenir dépendant, ou malade. Ce n’est pas parce qu’on est vieux qu’on a le droit de tuer sa femme. Cela montre toutefois qu’un homme qui vieillit n’est pas moins dangereux, et qu’il est urgent d’alerter les familles qui ont connaissance de violence dans le couple chez leurs parents, d’être attentifs, car l’épouse dépendante est à la merci de son bourreau.

COMMENT PROTÉGER LES FEMMES ÂGÉES EN DANGER de FÉMINICIDE ?

Il faut faciliter le dépôt de plainte dans les commissariats ou les gendarmeries, afin que les victimes ne renoncent pas à se protéger. Les policier·e·s doivent être formé·e·s systématiquement à ces cas spécifiques, où la victime a honte de parler et culpabilise. Porter plainte ne suffit pas toujours à protéger les femmes : il faut que les services compétents s’assurent que les conjoints violents respectent bien les mesures prises à leur encontre.

Il faut simplifier les procédures de justice, et réduire le délai entre la plainte et le jugement.

Il faut mettre en place des campagnes de prévention, par voie de presse, d’affichage, de médias ou réseaux sociaux sur les violences conjugales. Publier des messages qui montrent bien les responsabilités des uns et des autres, et qui nomment clairement ce que sont les violences sexuelles : des crimes. Il faut assurer que les criminels seront poursuivis et punis, et qu’aucun homme n’a droit de vie et de mort sur sa compagne – cela ne semble toujours pas bien clair pour certains ! Protéger après coup ne suffit pas.

Il est impératif d’éloigner immédiatement le conjoint violent (à ses frais) du domicile conjugal. Dans le même temps, il faut imposer aux conjoints violents la participation à des stages de sensibilisation sur les conséquences de leurs actes sur leur épouse et leur famille.

Il faut proposer des solutions d’hébergement adaptées à l’âge de la victime, lorsque son état de santé nécessite une prise en charge de la perte de dépendance – et pas à ses seuls dépens.

Plus sordide encore : il faut exiger que le « nettoyage de la scène de crime » ne soit plus à la charge des familles (comme c’est encore le cas régulièrement), mais soit fait par des services spécialisés.

Responsables politiques, élu·e·s, juges, policiers : qu’attendez-vous ?

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