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Dans le privé et le public, un syndicalisme de lutte pour la transformation sociale

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Salarié·e·s de PEI, une victoire haute en couleur !

Grace à leur motivation sans faille, la grève des employé·e·s de PEI travaillant sur le Technocentre Renault basé à Guyancourt dans les Yvelines (nommé TCR dans cet article) s’est soldée par une victoire le 3 juin. Retour sur un mois de mai mouvementé.

Menacé·e·s de perdre au mieux 20% de leur salaire, au pire leur emploi, 80 salarié·e·s du nettoyage se sont opposé·e·s à la multinationale Renault et à PEI, une société du groupe T2MC qui figure au Top 10 des entreprises de propreté françaises. Le 3 juin 2022, après un mois de grève totale et active, les représentant·e·s des grévistes et la direction de PEI ont signé un protocole de fin de conflit qui donne satisfaction à une grande partie des revendications des grévistes. Ce protocole comprend entre-autres les points suivants :

  • Un plan de départ volontaire du TCR réclamé par les salarié·e·s éreinté·e·s par des années de dur labeur et souvent exposé·e·s à des produits très nocifs. Ces départs pouvant s’effectuer dans le cadre d’une Rupture Conventionnelle Collective (RCC) avec indemnité supra-légale de 20% ou d’une mutation au volontariat sur la région parisienne (rapprochement de son domicile, changement pour une meilleure adaptation de son temps de travail…)
  • Une répartition des heures de travail pour les salariés qui resteront au TCR permettant d’éviter le recours au chômage partiel et la perte de salaire correspondante.
  • L’ouverture de négociations pour améliorer les conditions de travail et ajuster la charge de travail par un renforcement des effectifs si nécessaire.
  • Une nouvelle organisation du travail pour les salariés de PEI qui travaillent à Renault Lardy (Essonne) permettant de mettre fin au chômage partiel et à leur obligation de travailler sur plusieurs sites.
  • La fin du chômage partiel pour les salariés de PEI qui travaillent dans les usines Renault.
  • Le paiement des jours de grève.
  • L’engagement qu’il n’y aurait aucune sanction pour fait de grève.

Pas mal non ? Pendant ce mois de lutte, les grévistes de PEI nous ont donné une sacrée leçon de courage et de détermination ! Les directions de Renault, de PEI, mais aussi de certains syndicats de Renault ont tellement de mépris pour ces travailleuses et travailleurs de l’ombre issu·e·s à 100% de l’immigration qu’elles sont convaincues que les grévistes ont été manipulé·e·s. Ces costards-cravates sont incapables d’imaginer que les personnes qui nettoient leur merde sans broncher, s’exposent aux risques de contamination au covid dans l’indifférence quasi générale ont la niaque et la force de les faire plier. Cette victoire leur a montré, nous a montré qu’il n’y a pas que dans l’ancien testament ou chez Disney que les petit·e·s gagnent contre les gros·se·s.

La lutte des salarié·e·s de PEI du TCR en quelques dates :

Mars 2020: 1er confinement et début du chômage partiel.

La direction de PEI, probablement à la demande de Renault, a imposé le chômage partiel à 80% des salarié·e·s. Alors que les agents de PEI payé·e·s au Smic horaire avaient déjà du mal à boucler les fins de mois avant la crise du covid, ce chômage partiel auquel s’ajoute la diminution des primes comme la « prime panier » réduit significativement les montants perçus en fin de mois. La grogne au sein du personnel de PEI a commencé à ce moment-là.

Lundi 11 avril 2022 : Le démantèlement annoncé du TCR… Et une autre bonne nouvelle.

Présentation en CSSCT (Commission santé, sécurité et conditions de travail) du projet de cession avant fin 2022 de l’immobilier du TCR qui appartient au Groupe Renault par l’intermédiaire de sa filiale, la Société Civile Immobilière Plateau de Guyancourt. Ainsi, malgré un vote défavorable de 100% des élu·e·s lors du CSE du 14/04 (fait extrêmement rare), dès le début 2023, Renault deviendra locataire de ces locaux qu’elle a fait sortir de terre en 1998. Le projet mentionne que Renaut ne louerait plus que 76% des locaux au 1er janvier 2025, les 24% restants seront loués à d’autres sociétés… Avec ce changement de propriétaire et la désaffection des locaux, que vont devenir les salarié·e·s des entreprises de prestation de services PEI, Elior, Vestalia, Docaposte, Samsic, Penelope etc. ? En fin de réunion, comme si c’était un point de détail, la direction de Renault annonce aux représentant·e·s du personnel qu’elle a décidé de « mettre en veille » certains locaux du Technocentre tous les vendredis. Outre les répercussions sur pour les salarié·e·s Renault, la conséquence directe est la réduction du nombre d’heures de travail – et donc de salaire – pour les sociétés de prestation, principalement PEI pour le nettoyage et Elior pour les selfs (4 selfs sur les 5 encore en activité seront fermés les vendredis). Évidemment cette décision est unilatérale et ne fait pas l’objet d’une consultation des élu·e·s. De toutes façons, comme on l’a vu plus haut, le vote dans ce type d’instance n’a aucune valeur.

Jeudi 14 avril : Mépris pour les prestataires.

Communiqué interne officiel de la directrice des établissements Renault d’Ile de France : « Afin d’adapter les frais de fonctionnement des installations à la baisse de fréquentation des sites et au contexte économique, les zones tertiaires de certains bâtiments du site du Technocentre seront mises en veille les vendredis. […] Je suis consciente que ces fermetures pourront engendrer certains désagréments mais elles sont importantes pour contribuer au plan d’économie nécessaire au redressement du Groupe. » Traduction : une fois de plus, les prestataires servent de variable d’ajustement pour optimiser la trésorerie de Renault… Les « désagréments » pour les salariées de PEI et Elior, c’est juste la perte d’approximativement 20% de leurs salaires déjà bien maigres… Mais cela ne compte pas pour cette sabreuse.

Lundi 25 avril : C’est parti !

Premier jour de grève à l’appel des syndicats de PEI (FO, CFDT, CGT et SUD) soutenus par SUD Renault. Après 2 jours de joyeux tintamarre dans les couloirs et bureaux du TCR, les grévistes suspendent leur mouvement quand leur direction affirme qu’elle répondrait favorablement à leurs revendications.

Lundi 2 mai : Fête de la rupture du jeûne (Aïd el-Fitr).

On ne commence pas une grève un jour de fête… Eh oui, c’est aussi ça la réalité du secteur du nettoyage…

Mardi 3 mai : La direction de PEI a trahi ses engagements, la lutte reprend.

La direction étant revenue sur ses promesses de la semaine précédente lors du CSE (Comité Social et Economique), les salarié·e·s réuni·e·s en AG décident la reprise de la grève illimitée. À cette date, l’accès au site est encore possible aux grévistes mais interdit aux élu·e·s PEI exterieur·e·s au site, ce qui constitue une atteinte incontestable aux droits syndicaux. Pendant trois jours, les grévistes ont à nouveau animé le TCR en circulant, joyeux·ses mais déterminé·e·s, dans les bâtiments et les selfs à l’heure du repas, en occupant l’accueil principal etc… Elles et ils ont aussi un peu dérangé la visite protocolaire de M. Senard, le président du conseil d’administration de Renault. Alors que l’intégrité physique de ce môssieur n’était pas en danger, il a été exfiltré vite fait… Cachez cette plèbe que je ne saurais voir. À cette occasion, les grévistes de PEI ont pénétré dans le Saint des saints, à savoir le Design… Ce qu’aucun syndicat Renault n’a jamais fait (leçon numéro 1). Chaque jour, la poursuite de la grève est soumise au vote lors d’assemblées générales des grévistes plus ou moins assimilables à un comité de grève – le Délégué Syndical Central (DSC) FO de PEI demeurant l’animateur principal de ce mouvement.

Jeudi 5 mai : Les grévistes bloqué·e·s.

1er jour de désactivation des badges des salarié·e·s de PEI, y compris de certain·e·s non-grévistes. Les grévistes sont un peu pris·e·s de court, ne pouvant plus s’adresser aux occupant·e·s du TCR, dans l’ensemble assez bienveillant·e·s face à ce mouvement, ni poursuivre leur grève active sur le terrain. Elles et ils se rassemblent sur le parvis, face à l’accueil principal qui est encore ouvert pour les visiteurs et visiteuses.

Vendredi 6 mai : La « guerre de position » commence.

La direction a fait installer des barrières 20 mètres devant l’accueil principal. La présence des huissiers et gros bras sollicités par la direction de Renault commence à s’étoffer. Apparaissent un maître-chien et des cow-boys autres que ceux habituellement présents sur le TCR ; ces derniers étant peut-être jugés trop proches des grévistes car eux-mêmes craignent pour la pérennité de leurs emplois. Les grévistes partent en cortège sur la rocade qui ceinture le TCR, ce qu’aucun syndicat Renault n’a jamais fait (leçon numéro 2).

Lundi 9 mai : La « guerre de position » s’installe.

La première échauffourée entre les grévistes et la sécurité se solde par la reprise de l’esplanade où le premier « Tchep de grève » est partagé dans la joie. Ce repas convivial où nous découvrirons des saveurs jusqu’alors inconnues de nos palais aseptisés sera le premier d’une longue série. Première tentative d’intimidation par la police appelée par Renault. Étonnamment ils recherchent le secrétaire de SUD Renault TCR… Mais qui a bien pu leur donner son nom ? À cette date, le syndicat SM-TE du TCR sort un tract de soutien aux grévistes. À part SUD Renault qui a intégralement et activement soutenu la grève et la CGT, ce sera la seule autre expression de solidarité des syndicats Renault. Édifiant.

Mardi 10 mai : Début de la guerre de mouvement qui durera jusqu’à la fin de la grève.

Pas facile pour 80 grévistes de bloquer 19 entrées piétons et au moins 4 entrées véhicules réparties sur 150 hectares de terrain. Il s’engage donc un jeu du chat et de la souris pour empêcher les camions de pénétrer sur le site. On bloque une entrée, ils en ouvrent une autre… Des plans avec « itinéraires bis » sont distribués aux camionneurs pour contourner les piquets de grève pourtant maigres. A 80, les grévistes de PEI ont quand-même bien donné du fil à retordre à Renault sur ce site où travaillent approximativement 11000 salarié·e·s Renault et prestataires (leçon numéro 3).

Mercredi 11 mai : La direction de PEI rencontre une délégation de grévistes.

Ces dernièr·e·s demandent : « Pas de mutation, pas de licenciement, pas de perte de salaire, un plan de départ volontaire. » La direction répond en rappelant le diktat imposé par Renault : Réduction de 3 942 heures de nettoyage par mois sur le TCR, soit 27,6% du volume actuel. Il en résulterait 30 suppressions d’emplois (22 salarié·e·s à temps complet et 8 à temps partiel sur un effectif de 130). Avec les personnes qui bossent sur d’autres établissements concernés par les suppressions de postes, ce serait au total entre 60 et 80 salarié·e·s de PEI travaillant sur des sites Renault d’Ile-de-France qui risquent de perdre leur emploi.

Jeudi 12 mai : Coucou, c’est la maréchaussée!

3 cognes débarquent sur le piquet en tenue d’apparat (gilet pare-balles et tout le toutim). Appelés par la direction de Renault, on comprend de qui cette dernière veut la peau quand les condés demandent à nouveau à parler au secrétaire de SUD Renault TCR dont le nom leur a été opportunément communiqué et qui s’est vu gratifié du statut de « référent »… Bref, la direction de Renault, après avoir condamné l’entrée des poids-lourds (appelée PC4) de peur que les méchant·e·s grévistes pénètrent sur le TCR le couteau entre les dents, a demandé à la police de faire dégager cette entrée qui est devenue le point de ralliement des salarié·e·s en lutte de PEI. Pour que les poids-lourds puissent à nouveau entrer sur le site, la police menace de faire intervenir les CRS… Ça se tend. AG immédiate des grévistes qui, après des prises de paroles mémorables de salariées très déterminées, décident unanimement de ne pas céder. « On lâche rien ! » Les CRS ne sont jamais venus, zaï zaï zaï zaï…

Vendredi 13 mai : CSE extraordinaire de PEI : Larmes de crocodile.

Pour la direction de PEI, c’est Renault les méchants dans l’affaire… Ce n’est pas tout-à-fait faux mais quand les patrons s’opposent à toutes les demandes de la délégation arguant des millions d’euros à rembourser sur 9 ans, outre le fait qu’on connait bien cette vieille ficelle, on est en droit de rappeler l’appartenance de PEI à T2MC qui se targue d’être au TOP 10 des entreprises de propreté et dont le patron, M. Mohamed Tandert, roule en Maserati… Donc du fric, il y en a ! Par ailleurs, il faudrait nous expliquer comment une boîte qui n’a que très peu de frais fixes puisque son cœur de métier est le nettoyage de locaux dont elle n’a pas la charge et qui ne fait aucun investissement peut avoir un tel gouffre dans sa comptabilité… Que les ronds-de-cuir fassent des micmacs de comptabilité (comme graisser abondamment la patte de l’acheteur Renault en charge de la prestation de nettoyage – authentique !) ce n’est pas une nouveauté, mais ce n’est pas aux travailleuses et travailleurs de base d’en faire les frais !

Mardi 17 mai : Salarié·e·s Renault, Salarié·e·s PEI, du TCR ou de Lardy, toutes et tous uni·e·s!

Rassemblement sur le site Renault de Lardy (Essonne) à l’initiative des syndicats CGT et de SUD Renault qui se battent pour la pérennité des emplois sur ce site à l’avenir incertain à cause des « choix stratégiques » de la direction de Renault. Forte présence et prises de parole des grévistes de PEI. Sur le TCR des grévistes maintiennent le piquet de grève devant le PC4.

Lundi 23 mai: À Boulogne comme au TCR, la sécurisé se fait déborder.

Les grévistes de PEI réussissent à pénétrer dans le siège social de Renault situé Quai Le Gallo à Boulogne Billancourt, ce qu’aucun syndicat Renault n’a jamais fait (leçon numéro 4). Elles et ils ont mis de la couleur et de la joie dans ce triste bâtiment où se joue l’avenir de milliers de travailleuses et travailleurs. Il n’est pas certain que cette action très symbolique ait influencée la direction de Renault en quoi que ce soit mais cette nouvelle gageure a encore rapproché les grévistes certain·e·s d’avoir réalisé un véritable coup de force. Renault aurait porté plainte contre cette intrusion impromptue. Évidemment, qui le commissariat de Boulogne veut-il « entendre » ? le secrétaire de SUD Renault TCR pardi. C’est de l’acharnement. Merci la direction de Renault. Au TCR, les grévistes ont également réussi à pénétrer sur le site et fait un petit tour, histoire de rappeler aux salarié·e·s Renault qu’ils et elles sont toujours là et déterminées.

Mardi 24 mai : À l’usine de Cléon, les petits chefs jouent les gros bras.

Une quinzaine de grévistes de PEI ont fait le trajet jusqu’à l’usine Renault de Cléon (Seine Maritime) où PEI est également présente. Ils et elles ont pu pénétrer dans l’usine et ont été accueilli·e·s amicalement par la CGT Renault du site qui a l’habitude de soutenir les prestataires emmerdé·e·s par leur hiérarchie. Moins amicale a été la réception des petits chefs Renault qui se sont crus investis de la mission de protéger le self où les grévistes de PEI voulaient rencontrer les personnes travaillant dans cette usine… Ces garde-chiourmes zélés ont été responsable d’une bousculade qui s’est soldée par une camarade gréviste aux urgences de l’hôpital de Rouen. Rien de tel pour resserrer encore plus les liens entre les grévistes. Une attaque contre l’un·e d’entre nous, c’est une attaque contre tou·te·s ! Fait rarissime, 5 camions de CRS ont pénétré dans l’enceinte de l’usine. La direction devait vraiment chier dans son froc.

Suite à cette action, la CFE-CGC de Cléon a distribué un tract particulièrement nauséabond dénonçant « un 1er échelon de violence inquiétant » et assurant son « soutien à l’ensemble des salariés qui ont essayé d’éviter que des personnes extérieures à l’établissement avec des intentions non déterminées ne rentrent dans les ateliers ». Bien entendu, la violence que dénoncent ces les chiens de garde de la direction n’est pas celle des patrons voyous ni celle des petits chefs qui ont fait le coup de poing contre des grévistes pacifiques majoritairement féminines.

Mercredi 25 mai : Les PEI à l’assemblée générale des actionnaires.

Nos camarades n’ont pas été convié·e·s mais elles et ils se sont invité·e·s. Évidemment, comme les prolos en lutte ça fait peur (surtout quand ce ne sont pas des descendant·e·s directes de Clovis), il y avait le déploiement policier ad ’hoc pour protéger la petite sauterie de ces braves gens qui vivent sur le dos des travailleuses et travailleurs. Les grévistes sont resté·e·s sur le trottoir, ce qui a donné lieu à de nouvelles prises de paroles mémorable de salariées grévistes.

Lundi 30 mai : Au tour de la direction de PEI de chier dans son froc.

Celle-là, ils ne l’ont pas vue venir : La descente des grévistes au siège social de PEI à Morangis (Essonne). One more time : Sono tonitruante, déambulations colorées et joyeuses dans les locaux de la direction et « Tchep de grève ». Même si ce bâtiment n’est ni un site client, ni un lieu de production, il semblerait bien que la visite intempestive des grévistes ait marqué un tournant dans la lutte car c’est au cours de cette semaine que la direction de PEI a fini par accepter de s’atteler à un protocole de fin de conflit tenant compte des revendications légitimes des grévistes.

Mardi 31 mai: La direction de PEI fait rentrer des intérimaires de Adecco.

Évidemment c’est illégal mais, bien que la direction de Renault ait tenté de faire croire que cette grève n’a aucun impact sur le nettoyage des locaux, les photos prises dans les bâtiments prouvent le contraire… Il y a fort à parier que Renault, constatant les nombreuses lacunes sur l’hygiène et la propreté a imposé à PEI de faire ce qu’il fallait pour invisibiliser l’impact de la grève.

Mercredi 1er juin : Un CSSCT extraordinaire, enfin, après 3 relances de SUD.

La direction de Renault affirme qu’il y aurait 50 non-grévistes sur 120 salariés de PEI du Technocentre, ce à quoi le RS de SUD rétorque que PEI a fait rentrer des salarié·e·s d’autres sites (Plessis, Boulogne.) et des intérimaires d’Adecco. Tout en reconnaissant que l’état de propreté du Technocentre s’est dégradé, la direction de Renault affirme que le nombre de non-grévistes permettrait d’assurer un service minimum. Elle refuse de négocier directement avec les grévistes arguant que la grève est uniquement « la faute de la direction de PEI qui ne sait pas gérer son personnel ». La possibilité que Renault réduise le nombre de salarié·e·s de PEI sur le Technocentre serait prévue dans le contrat commercial passé entre Renault et PEI, donc le constructeur considère ne rien avoir à se reprocher.

Jeudi 2 et vendredi 3 juin : La direction de PEI craque, ça se précipite.

Jeudi, réunion de négociation entre la direction de PEI et les représentant·e·s des grévistes. Le protocole de fin de conflit obtenu est présenté aux grévistes et soumis au vote lors de l’AG de vendredi matin. Le protocole est accepté et la grève suspendue. Suspension de courte durée car la direction de PEI se dédie à nouveau et refuse de payer les jours de grève. Ni une ni deux, les salarié·e·s en lutte se remettent illico en mouvement, trompent la vigilance des gardiens, pénètrent tou·te·s sur le site, vont mettre de l’ambiance dans le seul self ouvert et s’installent dans le hall principal déterminé·e·s à occuper le terrain le temps qu’il faudra. On ne sait pas si c’est Renault qui a sonné la fin de la partie et imposé à la direction de PEI de faire ce qu’il fallait pour que cette occupation cesse ; quoi qu’il en soit, en milieu d’après-midi, la direction de PEI signifie au DSC FO de PEI qu’elle respectera les termes du protocole proposé la veille. C’est la victoire ! Les grévistes quittent le site en cortège au son de l’internationale, le sourire aux lèvres et le poing tendu. Le soir même, le protocole de fin de conflit est signé.

Mardi 7 juin : Tête haute et larmes de joie.

Un grand moment d’émotion que ce retour à un travail pourtant épuisant. Pour les grévistes de PEI, cette reprise marque la fin victorieuse d’une lutte exemplaire, la fin d’une parenthèse pendant laquelle elles et ils ont partagé les AG, les décisions soumises aux votes, les blocages, les occupations, les cortèges, les diffusions de tracts, les collectes, les repas conviviaux, mais aussi les frictions avec les Cerbères, les moments de doutes, de crispation et parfois de démotivation… Mais cette reprise marque également le début d’une amitié indéfectible, de celles qui lient les camarades de lutte qui ont tant partagé. A leur arrivée sur leurs lieux de travail, plusieurs militant·e·s de PEI ont été congratulé·e·s, voir ovationné·e·s par des salarié·e·s Renault et d’autres prestataires. Il serait injuste de ne pas citer les nombreuses marques de solidarité comme les versements à la caisse de grève, la distribution de bouteilles d’eau etc… Mention spéciale aux salarié·e·s de Vestalia dont le lieu de travail (le magasin) est situé à coté du PC4 où se tenait le piquet de grève et qui ont manifesté leur soutien aux grévistes, entre autres en mettant généreusement la main à la poche… Il faut dire qu’ils et elles ont mené plusieurs combats dont une grève assez dure en février 2020 car, comme les agents de PEI, ils et elles font les métiers les plus accidentogènes dont Renault s’est débarrassé, bossent dans des conditions déplorables et subissent le mépris de leur direction et de celle de Renault.

Solidaires 78 remarque et se réjouit des pratiques de cette lutte : Autogestion, comité de grève, démocratie directe, assemblée générale souveraine… Ici, des esprits chagrins pourront critiquer le rôle occupé par le DSC FO de PEI et les élu·e·s de PEI « hors sol », affirmer que « ce n’est pas un véritable comité de grève » etc… Cependant, l’AG quotidienne a été mise en place dès le début de la grève et les décisions étaient prises collégialement, y compris la signature du protocole de fin de confit. Dont acte. Cette lutte d’un mois a rapproché les salarié·e·s de PEI qui se connaissaient peu et se rencontraient rarement du fait de leurs horaires décalés et de l’éparpillement de leurs lieux de travail sur ce site immense. Le seul regret est que ce mouvement n’ait pas fait tache d’huile et que les employé·e·s des sociétés de prestation citées plus haut ne se sont pas raccroché·e·s au mouvement alors qu’ils et elles devraient se sentir concerné·e·s. Mais tout n’est pas perdu car les grévistes de PEI ont prouvé qu’on peut encore gagner face à des patrons voyous. Une graine a été plantée, espérons qu’elle portera ses fruits.

D’après un article initialement paru dans Courant Alternatif n° 322, signé « O Cangaceiro », le 30 juin 2022

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